đŸđđ Eat's business on the beach đđ·đ§ 2025-23
Bonjour Ă toutes et Ă tous, Eat's Business est une newsletter dans laquelle vous trouverez une revue de presse de quelques articles sur le monde de lâalimentaire qui mâont semblĂ© intĂ©ressants dans la semaine prĂ©cĂ©dente.
Pour ceux qui veulent la formule ristretto, les 3 articles que je vous conseille de lire en priorité cette semaine sont :
Les Ăchos, Unilever, Kraft Heinz, Kellogg⊠l'heure des grandes manoeuvres a sonnĂ© pour les gĂ©ants des supermarchĂ©s, 18/07/2025
The Guardian, Rising food prices driven by climate crisis threaten worldâs poorest, report finds, 21/07/2025
New York Times, Americaâs Protein Obsession Is Transforming the Dairy Industry, 16/07/2025
Bonne lecture et bonne semaine Ă toutes et Ă tous!
Pour celles et ceux dâentre vous qui ont plus de temps pour la formule lungo :
Le Monde, StĂ©phane Le Bras, historien : « Lâalimentation joue un rĂŽle essentiel dans les Ă©changes entre les cultures », 12/07/2025
Dans cet entretien lâhistorien StĂ©phane Le Bras, maĂźtre de confĂ©rences Ă lâUniversitĂ© Clermont-Auvergne, explore les multiples dimensions culturelles, sociales et politiques de lâalimentation. Loin dâĂȘtre un simple acte biologique ou quotidien, manger est un fait social total, qui façonne lâimaginaire collectif, structure les identitĂ©s individuelles et cristallise des tensions historiques.
StĂ©phane Le Bras retrace dâabord le rĂŽle de la nourriture dans la construction des repĂšres culturels depuis lâAntiquitĂ©, soulignant sa prĂ©sence constante dans lâart, la littĂ©rature, le cinĂ©ma et, aujourdâhui, sur les rĂ©seaux sociaux. Il Ă©voque la madeleine de Proust comme archĂ©type dâun repĂšre sensoriel et identitaire profondĂ©ment ancrĂ© dans la mĂ©moire collective française. Mais ces reprĂ©sentations sont aussi Ă lâorigine de normes contraignantes, comme lâidĂ©al de minceur contemporain, qui alimente des troubles alimentaires chez des centaines de milliers de jeunes.
Lâalcool, autre pilier symbolique, est prĂ©sentĂ© comme un rĂ©vĂ©lateur culturel, oscillant entre valorisation esthĂ©tique (poĂ©sie, peinture, chanson) et dĂ©nonciation morale (ligues antialcooliques). StĂ©phane Le Bras dĂ©fend Ă©galement lâidĂ©e que la cuisine peut ĂȘtre un art, tant par la maĂźtrise des gestes que par lâesthĂ©tique des plats, aujourdâhui sublimĂ©e sur Instagram. Il rapproche la quĂȘte des chefs de celle des artistes, dans une logique de distinction, dâinnovation et dâhĂ©ritage.
Lâentretien aborde ensuite les reprĂ©sentations nĂ©gatives de la malbouffe, analysĂ©es Ă la fois comme une crainte hygiĂ©niste moderne et comme une forme de mĂ©pris social. Les choix alimentaires sont des marqueurs dâidentitĂ© et de classe, comme le thĂ©orisait Pierre Bourdieu, et bien manger demeure un privilĂšge inĂ©galement rĂ©parti. La montĂ©e des fast-foods et des plats industriels est ainsi contrebalancĂ©e par une revalorisation des produits de terroir et du « fait maison ».
Enfin, StĂ©phane Le Bras examine lâinternationalisation des pratiques alimentaires, Ă travers la diffusion planĂ©taire de produits comme le burger ou les sushis, mais aussi la rĂ©surgence des cuisines communautaires, dans un contexte dâhybridation et de repli identitaire. Il souligne les dĂ©rives capitalistes du goĂ»t, manipulĂ© depuis le XIXe siĂšcle par lâagro-industrie via le marketing, la publicitĂ© et mĂȘme la littĂ©rature. Ă ses yeux, rĂ©habiliter le goĂ»t comme sens majeur pourrait permettre une redĂ©couverte du lien sensoriel et culturel que chacun entretient avec la nourriture.
Le Monde, Ferrero achÚte les céréales de Kellogg et se renforce aux Etats-Unis, 10/07/2025
Le groupe Ferrero poursuit son expansion agressive sur le marchĂ© nord-amĂ©ricain avec lâacquisition de WK Kellogg, la branche cĂ©rĂ©aliĂšre amĂ©ricaine issue de la scission du groupe Kelloggâs. Pour un montant de 3,1 milliards de dollars, le gĂ©ant italien de la confiserie, dĂ©jĂ connu pour ses marques emblĂ©matiques comme Nutella, Kinder ou Tic Tac, sâempare de marques historiques tels que Corn Flakes, All-Bran et Rice Krispies. Cette opĂ©ration stratĂ©gique doit encore ĂȘtre validĂ©e par les actionnaires de WK Kellogg, mais elle devrait aboutir au second semestre 2025.
Ce rachat sâinscrit dans une politique de croissance externe entamĂ©e depuis plusieurs annĂ©es par Ferrero. AprĂšs avoir acquis Fannie May en 2017 puis des marques amĂ©ricaines de confiserie cĂ©dĂ©es par NestlĂ© (Butterfinger, Baby RuthâŠ), Ferrero sâest progressivement imposĂ© comme un acteur majeur de la grande consommation outre-Atlantique. Lâacquisition de WK Kellogg permet au groupe de consolider sa prĂ©sence dans un secteur en mutation, marquĂ© par une baisse de consommation des cĂ©rĂ©ales du petit-dĂ©jeuner et une prĂ©fĂ©rence croissante des consommateurs pour des produits dâentrĂ©e de gamme ou alternatifs.
WK Kellogg souffre actuellement dâune perte de vitesse, consĂ©quence directe dâun changement dâhabitudes alimentaires aux Ătats-Unis, oĂč le petit-dĂ©jeuner classique perd de son attrait. La forte inflation de ces derniĂšres annĂ©es a Ă©galement renforcĂ© lâattrait pour les marques distributeurs. Ce contexte dĂ©licat nâa cependant pas freinĂ© Ferrero, qui voit dans cette acquisition une opportunitĂ© dâĂ©largir sa gamme de produits et de diversifier son portefeuille au-delĂ des confiseries sucrĂ©es.
Le groupe dirigĂ© par Giovanni Ferrero a quasiment doublĂ© son chiffre dâaffaires en dix ans, atteignant 18,4 milliards dâeuros en 2024. Sa stratĂ©gie repose sur une forte diversification : Ferrero a rachetĂ© les biscuits Michel et Augustin, les biscuits belges Delacre, un fournisseur turc de noisettes (Oltan), ou encore un fabricant amĂ©ricain de crĂšmes glacĂ©es (Wells Enterprises). En parallĂšle, il investit massivement dans le marketing, Ă lâimage de sa prĂ©sence estivale Ă Paris Plages avec Kinder.
Enfin, Ferrero demeure hostile Ă lâĂ©tiquetage nutritionnel Nutri-Score, que ses produits â riches en sucre et en huile de palme â arboreraient souvent avec un score E. Le groupe sâoppose activement Ă toute rĂ©gulation europĂ©enne en ce sens, tout en misant sur lâinnovation marketing (Nutella vegan, version au beurre de cacahuĂštesâŠ) pour sĂ©duire de nouveaux consommateurs.
Les Ăchos, Unilever, Kraft Heinz, Kellogg⊠l'heure des grandes manoeuvres a sonnĂ© pour les gĂ©ants des supermarchĂ©s, 18/07/2025
Face Ă une conjoncture difficile et Ă lâĂ©volution rapide des comportements des consommateurs, les gĂ©ants de la grande consommation entament une vaste rĂ©organisation stratĂ©gique. Unilever, Kraft Heinz, Kellogg ou encore Reckitt revoient leurs portefeuilles de marques, vendent des segments jugĂ©s moins rentables ou envisagent des scissions pour mieux rĂ©pondre aux attentes des marchĂ©s financiers.
Lâexemple de Kellogg illustre cette tendance : la scission du groupe en deux entitĂ©s distinctes, Kellanova (snacking) et WK Kellogg (cĂ©rĂ©ales amĂ©ricaines), a permis une valorisation significative. Kellanova a Ă©tĂ© vendue Ă Mars pour 36 milliards de dollars tandis que WK Kellogg a Ă©tĂ© rachetĂ© par Ferrero pour 3,1 milliards. Ces mouvements, saluĂ©s par les analystes, visent Ă recentrer les groupes sur des segments Ă plus forte marge et croissance.
Unilever, de son cĂŽtĂ©, prĂ©pare lâintroduction en Bourse de sa division glaces (Magnum, Ben & Jerryâs) Ă Amsterdam, une activitĂ© jugĂ©e trop spĂ©cifique pour sâintĂ©grer dans lâensemble du portefeuille. Reckitt, quant Ă lui, se dĂ©leste de ses produits dâentretien les moins performants pour renforcer sa position sur le marchĂ© du soin personnel.
Kraft Heinz, en difficultĂ© depuis sa fusion orchestrĂ©e par 3G Capital et Warren Buffet, envisage Ă©galement une sĂ©paration. Lâobjectif serait de regrouper les marques de sauces, repas et snacks dâun cĂŽtĂ©, et de cĂ©der les produits alimentaires standardisĂ©s de lâautre. Lâentreprise veut ainsi redevenir un acteur spĂ©cialisĂ© plus agile et plus compĂ©titif.
Ces grandes manĆuvres reflĂštent une conviction stratĂ©gique partagĂ©e : mieux vaut dominer un segment spĂ©cifique que dâĂȘtre prĂ©sent de maniĂšre superficielle dans plusieurs catĂ©gories. Lâexemple de la glace, qui nĂ©cessite une logistique et des savoir-faire spĂ©cifiques, illustre bien ce raisonnement.
Enfin, ces mouvements pourraient prĂ©figurer de futures fusions. Certains analystes Ă©voquent un rapprochement potentiel entre Unilever et Reckitt, ou entre Heinz (sĂ©parĂ© de Kraft) et McCormick (leader mondial des Ă©pices). Le marchĂ© est en pleine recomposition, et les mastodontes de lâagroalimentaire cherchent Ă sâadapter Ă un monde post-Covid, inflationniste et fragmentĂ©.
Le Figaro, 70 grands chefs alertent sur le risque de «dégastronomisation» de la France, 25/07/2025
Dans cette tribune, soixante-dix grands chefs français, dont Anne-Sophie Pic, Alain Ducasse, HĂ©lĂšne Darroze, Yannick AllĂ©no ou encore Philippe Etchebest, lancent un « cri dâalarme » face Ă ce quâils qualifient de « dĂ©gastronomisation » de la France. RassemblĂ©s par le think tank gastronomique Le Passe, les signataires appellent les pouvoirs publics Ă reconnaĂźtre la gastronomie comme une « exception culturelle » au mĂȘme titre que le cinĂ©ma ou la musique.
Les chefs dĂ©plorent lâaccumulation de contraintes administratives, fiscales et sociales qui fragilisent durablement le secteur de la restauration artisanale. Parmi ces freins, sont citĂ©s : le plafonnement de la prime Macron, la rĂ©duction des aides Ă lâapprentissage, ou encore la fiscalisation des pourboires. Autant de mesures qui limitent la capacitĂ© des restaurateurs Ă valoriser leurs Ă©quipes et Ă pĂ©renniser leur activitĂ©. Ils revendiquent un soutien spĂ©cifique au « fait maison », avec une fiscalitĂ© diffĂ©renciĂ©e par rapport Ă la restauration industrielle, ainsi quâun renforcement de lâĂ©ducation alimentaire dĂšs lâĂ©cole.
Les auteurs de la tribune insistent sur lâimportance de la gastronomie comme pilier du patrimoine national, vecteur de lien social et de rayonnement international. Bien quâelle soit inscrite depuis 2010 au patrimoine culturel immatĂ©riel de lâUNESCO, cette reconnaissance reste symbolique, selon eux, et ne suffit pas Ă protĂ©ger un modĂšle en danger. Lâuniformisation de lâoffre alimentaire, la pression des chaĂźnes de restauration rapide et la montĂ©e de la malbouffe sont autant de menaces contre lesquelles ils sâĂ©lĂšvent.
Le texte Ă©voque Ă©galement la crise des vocations, la fermeture de nombreuses tables indĂ©pendantes et le poids croissant des contraintes Ă©conomiques. Pour les signataires, il est urgent de restaurer la valeur culturelle, sociale et Ă©conomique de la cuisine française. Ils dĂ©fendent une gastronomie dâauteur, fondĂ©e sur la crĂ©ativitĂ©, lâexigence, le savoir-faire artisanal et la transmission.
Ce manifeste collectif, rare par son ampleur et la notoriĂ©tĂ© de ses auteurs, constitue une tentative de remobilisation face Ă un affaiblissement structurel du tissu gastronomique français. Il traduit lâinquiĂ©tude dâun milieu qui se sent Ă la croisĂ©e des chemins, entre excellence artisanale et pressions industrielles.
Les Ăchos, Les confitures menacĂ©es par une pĂ©nurie de fruits en Europe, 24/07/2025
Dans un contexte climatique particuliĂšrement dĂ©favorable, lâindustrie europĂ©enne de la transformation de fruits, notamment pour les confitures et compotes, fait face Ă une pĂ©nurie inquiĂ©tante de matiĂšres premiĂšres en 2025. Selon la FĂ©dĂ©ration des industries dâaliments conservĂ©s (Fiac), cette situation rĂ©sulte dâune succession de mauvaises rĂ©coltes liĂ©es Ă des conditions mĂ©tĂ©orologiques extrĂȘmes : gel, pluies abondantes, grĂȘle ou sĂ©cheresse selon les rĂ©gions.
La France, tout comme dâautres pays producteurs europĂ©ens, est directement touchĂ©e. En Pologne, pays leader pour lâexportation de fraises, la production a chutĂ© de moitiĂ© Ă cause dâun printemps pluvieux et froid. En Serbie, grand fournisseur de framboises, la sĂ©cheresse a provoquĂ© une baisse similaire. Les rĂ©coltes de rhubarbe, cerises, cassis ou abricots sont Ă©galement compromises. Pour ce dernier fruit, bien que la production française soit bonne, les abricots sont orientĂ©s vers le marchĂ© du frais, laissant peu de volumes pour la transformation. Ailleurs, en Espagne, GrĂšce ou Turquie, les intempĂ©ries ont anĂ©anti une partie des cultures.
Cette pĂ©nurie entraĂźne une flambĂ©e gĂ©nĂ©ralisĂ©e des prix des fruits, impactant fortement la rentabilitĂ© des entreprises du secteur. La Fiac sâalarme du fait que certaines espĂšces, comme les cerises griottes, pourraient tout simplement ne pas ĂȘtre disponibles cette annĂ©e. En parallĂšle, les industriels sont confrontĂ©s Ă une pression de la grande distribution, qui exige des baisses de tarifs alors mĂȘme que les coĂ»ts de production explosent.
Le secteur, qui pĂšse environ 1,7 milliard dâeuros et emploie prĂšs de 10 000 personnes en France, se retrouve dans une impasse. Les entreprises tentent de sĂ©curiser des approvisionnements Ă lâinternational, mais les conditions sont tendues sur tous les marchĂ©s. Certaines envisagent des reformulations de recettes, voire lâarrĂȘt temporaire de certaines rĂ©fĂ©rences.
Pour la Fiac, cette crise dĂ©passe la simple logique conjoncturelle. Elle reflĂšte la fragilitĂ© croissante des filiĂšres agricoles europĂ©ennes face au dĂ©rĂšglement climatique. Lâenjeu est aussi celui de la survie de nombreuses PME agroalimentaires, qui peinent Ă absorber les chocs rĂ©pĂ©tĂ©s liĂ©s Ă la mĂ©tĂ©o, aux coĂ»ts de lâĂ©nergie, Ă la pression des prix et Ă la volatilitĂ© des matiĂšres premiĂšres.
Les Ăchos, A Tours, au coeur des serres oĂč NestlĂ© invente le cafĂ© du futur, 23/07/2025
Dans les serres discrÚtement installées à proximité de Tours, Nestlé développe une stratégie agronomique ambitieuse pour faire face aux défis climatiques qui menacent la culture mondiale du café. Ce centre de recherche international, dédié principalement au café, concentre ses efforts sur la création de nouvelles variétés de caféiers plus résilientes, plus productives et adaptées aux conditions environnementales de demain.
Les scientifiques y cultivent environ 120 variĂ©tĂ©s dâarabica et de robusta, sĂ©lectionnĂ©es selon leurs performances en matiĂšre de rendement, de rĂ©sistance aux maladies et au stress hydrique, et bien entendu, de qualitĂ© gustative. Lâobjectif est de combiner des traits gĂ©nĂ©tiques complĂ©mentaires pour crĂ©er des variĂ©tĂ©s capables de produire davantage de grains tout en rĂ©duisant lâusage dâeau et dâintrants, contribuant ainsi Ă une rĂ©duction de lâempreinte carbone de la filiĂšre.
Le processus, long et mĂ©ticuleux, passe par des croisements contrĂŽlĂ©s, une sĂ©lection gĂ©nomique assistĂ©e par des marqueurs ADN, et une multiplication intensive en laboratoire via le bouturage. Ces techniques permettent de produire des plants sains, homogĂšnes et parfaitement traçables, aptes Ă ĂȘtre diffusĂ©s ensuite dans les pĂ©piniĂšres partenaires de NestlĂ© Ă travers le monde, notamment en CĂŽte dâIvoire, en Ăquateur et en ThaĂŻlande.
Cette innovation agronomique sâinscrit dans une logique Ă©conomique et stratĂ©gique : le cafĂ© reprĂ©sente un pilier essentiel du chiffre dâaffaires de NestlĂ©, avec la marque NescafĂ© en tĂȘte, consommĂ©e dans plus dâune tasse sur sept dans le monde. Pour faire face Ă la rĂ©duction possible de 50 % des zones propices Ă la culture du cafĂ© dâici 2050, le groupe a investi massivement dans la recherche et lâadaptation variĂ©tale, avec un plan de soutien global Ă la filiĂšre.
Deux variĂ©tĂ©s issues de ce centre sont dĂ©jĂ en exploitation commerciale : le « Roubi » au Mexique et le « Star 4 » au BrĂ©sil. Lâenjeu est autant Ă©conomique quâenvironnemental et social, puisquâil sâagit aussi de garantir la sĂ©curitĂ© des revenus des producteurs de cafĂ© Ă travers le monde, en leur fournissant des plants plus adaptĂ©s aux conditions climatiques changeantes.
Ce centre de Tours incarne ainsi une innovation discrÚte mais essentielle, à la croisée de la biotechnologie végétale, de la souveraineté agricole et de la durabilité.
Le Monde, La pùtisserie allégée a du mal à faire recette, 26/07/2025
La pĂątisserie française, reconnue mondialement pour son raffinement esthĂ©tique et gustatif, fait face Ă une contradiction croissante : malgrĂ© son aura de prestige, elle sâinscrit de plus en plus dans la catĂ©gorie des aliments ultra-transformĂ©s, riches en sucres, graisses et pauvres en fibres. Lâarticle explore cette tension entre plaisir, santĂ© et tradition.
Alors que la cuisine salĂ©e française a connu une rĂ©volution diĂ©tĂ©tique dans les annĂ©es 1970 â tournant vers les produits frais, les saisons et la lĂ©gĂšretĂ© â, le monde de la pĂątisserie reste, lui, globalement inchangĂ©. Certes, les quantitĂ©s de sucre ont Ă©tĂ© progressivement rĂ©duites dans certaines recettes, comme le rappelle le chef Christophe Michalak, mais les ingrĂ©dients de base (beurre, farine blanche, sucre raffinĂ©, crĂšme) dominent toujours largement.
Des pĂątissiers comme FrĂ©dĂ©ric Bau, qui prĂŽne une « gourmandise raisonnĂ©e », expĂ©rimentent de nouvelles approches : rĂ©duction du sucre, remplacement de certaines matiĂšres grasses, introduction dâingrĂ©dients Ă plus forte valeur nutritionnelle. Mais ces tentatives restent marginales, car elles se heurtent Ă plusieurs obstacles : la complexitĂ© technique, le coĂ»t Ă©levĂ© des alternatives, la rĂ©sistance du public Ă des textures et saveurs diffĂ©rentes.
Le plaisir sucrĂ© reste profondĂ©ment ancrĂ© dans la culture française. Il incarne la fĂȘte, la rĂ©compense, le savoir-faire. Les Ă©missions de tĂ©lĂ©vision Ă succĂšs, les vitrines de grandes maisons et la littĂ©rature culinaire cĂ©lĂšbrent encore une pĂątisserie oĂč lâabondance et lâesthĂ©tique priment. Le dĂ©sĂ©quilibre nutritionnel est rarement mis en question dans lâespace mĂ©diatique, sauf dans les cercles scientifiques ou de santĂ© publique.
Lâarticle interroge donc la possibilitĂ© dâune mutation durable de la pĂątisserie française vers un modĂšle plus sain. Il souligne aussi les paradoxes : une demande croissante de transparence, dâauthenticitĂ©, de bien-ĂȘtre, mais une tolĂ©rance persistante envers les excĂšs sucrĂ©s dans le domaine du dessert.
En dĂ©finitive, la pĂątisserie reste un terrain culturel sensible, oĂč la rĂ©forme est lente, tant les enjeux identitaires, esthĂ©tiques et sensoriels y sont puissants. Transformer la pĂątisserie française sans trahir son essence demeure un dĂ©fi majeur.
Inc, The Robot Revolution Is Already Happening in Restaurants. Hereâs What It Looks Like, 22/07/2025
Lâarticle explore lâessor des robots dans lâindustrie de la restauration, un phĂ©nomĂšne qui dĂ©passe dĂ©sormais le simple gadget mĂ©diatique pour sâimposer comme une rĂ©ponse structurelle aux dĂ©fis du secteur. Lâexemple le plus marquant est celui du robot humanoĂŻde Optimus de Tesla, vu en train de servir du popcorn dans un diner de Hollywood, Ă©vĂ©nement symbolique dâune tendance plus large : lâintĂ©gration de robots dans des tĂąches de service et de cuisine.
Le recours Ă lâautomatisation sâexplique principalement par la pĂ©nurie chronique de main-dâĆuvre dans le secteur de la restauration. En 2024, prĂšs de la moitiĂ© des restaurateurs amĂ©ricains dĂ©claraient vouloir recourir davantage Ă lâautomatisation. Ces robots ne sont pas lĂ pour remplacer les humains, mais plutĂŽt pour amĂ©liorer la productivitĂ©, allĂ©ger certaines tĂąches pĂ©nibles ou chronophages, et augmenter la sĂ©curitĂ© en cuisine. Des machines comme Flippy, dĂ©ployĂ©es chez White Castle ou Jack in the Box, sâoccupent ainsi de la cuisson des aliments frits avec rĂ©gularitĂ© et sans risque de brĂ»lure.
Des entreprises comme Bear Robotics ont dĂ©veloppĂ© des robots de service autonomes â non humanoĂŻdes â comme le robot Servi, utilisĂ© dans des milliers de restaurants pour acheminer les plats ou dĂ©barrasser les tables. Chipotle, de son cĂŽtĂ©, expĂ©rimente des machines capables de prĂ©parer les avocats pour gagner du temps.
Lâarticle souligne Ă©galement que lâutilisation de robots dans la restauration sâinscrit dans une logique Ă©conomique et culturelle. Les robots ne demandent ni pourboires ni pauses, ne tombent pas malades, et offrent une constance prĂ©cieuse. Par ailleurs, leur prĂ©sence dans les Ă©tablissements suscite lâintĂ©rĂȘt des clients et renforce lâattrait marketing des lieux, Ă lâimage du diner Tesla au look rĂ©tro-futuriste.
Enfin, lâarticle ouvre la rĂ©flexion vers dâautres secteurs. Le secrĂ©taire amĂ©ricain Ă la Marine Ă©voque par exemple les apports des robots dans lâindustrie navale, en perte de compĂ©tences, et Boris Sofman, fondateur de Bedrock Robotics, imagine des robots sur les chantiers de construction pour pallier la pĂ©nurie de main-dâĆuvre. Elon Musk, quant Ă lui, continue de promouvoir Optimus comme figure de proue dâun futur oĂč les robots humanoĂŻdes feront partie du quotidien.
Le message sous-jacent : la rĂ©volution robotique dans la restauration nâest que le dĂ©but dâun bouleversement industriel bien plus vaste.
The Guardian, Rising food prices driven by climate crisis threaten worldâs poorest, report finds, 21/07/2025
Un rapport alarmant met en lumiĂšre lâimpact croissant des Ă©vĂ©nements climatiques extrĂȘmes sur les prix alimentaires mondiaux, avec des consĂ©quences dramatiques pour les populations les plus vulnĂ©rables. Les auteurs, issus de plusieurs instituts de recherche dont lâEnergy & Climate Intelligence Unit (ECIU), ont documentĂ© entre 2022 et 2024 une corrĂ©lation forte entre pics de tempĂ©rature, sĂ©cheresses, inondations et flambĂ©es des prix.
Parmi les cas Ă©tudiĂ©s : le triplement du prix du cacao Ă cause de la sĂ©cheresse en CĂŽte dâIvoire et au Ghana, lâexplosion des prix de lâoignon en Inde, de la pomme de terre au Royaume-Uni ou du chou en CorĂ©e du Sud. Ces hausses rĂ©duisent lâaccĂšs Ă une alimentation saine, entraĂźnent un basculement vers des produits moins nutritifs et accentuent la malnutrition.
Les effets ne sont pas seulement sanitaires : ils sont aussi politiques. LâĂ©tude suggĂšre que lâinflation alimentaire a jouĂ© un rĂŽle dans certaines Ă©lections rĂ©centes, comme aux Ătats-Unis. Historiquement, on observe que les flambĂ©es du prix du blĂ© ont pu dĂ©clencher des Ă©meutes, comme au Mozambique en 2010, lorsque la Russie avait interrompu ses exportations.
Le rapport souligne aussi un effet Ă©conomique global : lâaugmentation du coĂ»t des denrĂ©es de base alimente lâinflation gĂ©nĂ©rale, ce qui freine les baisses de taux dâintĂ©rĂȘt et compromet la reprise Ă©conomique. En mai 2024, une sĂ©cheresse au Royaume-Uni a ainsi contribuĂ© Ă un pic dâinflation inattendu.
Enfin, les auteurs insistent sur lâurgence climatique : tant que les Ă©missions de gaz Ă effet de serre ne sont pas rĂ©duites drastiquement, ces Ă©vĂ©nements mĂ©tĂ©orologiques extrĂȘmes se multiplieront. Lâalimentation devient lâun des marqueurs les plus visibles des effets du changement climatique : pour les citoyens, la hausse des prix alimentaires arrive juste aprĂšs les vagues de chaleur comme impact perçu du dĂ©rĂšglement climatique.
CNBC, Protein has become Americaâs latest obsession. Companies like General Mills and PepsiCo are capitalizing on it, 22/07/2025
Lâarticle dĂ©crypte lâengouement massif des consommateurs amĂ©ricains pour les produits enrichis en protĂ©ines, devenu un axe stratĂ©gique majeur pour les grands groupes agroalimentaires. Des entreprises comme General Mills, PepsiCo ou Kellogg reformulent leurs offres pour y intĂ©grer plus de protĂ©ines, surfant sur une tendance qui dĂ©passe largement le cercle des sportifs.
La demande en protĂ©ines touche dĂ©sormais tous les publics : seniors soucieux de prĂ©server leur masse musculaire, jeunes adultes influencĂ©s par les rĂ©gimes âhealthyâ, adeptes du rĂ©gime keto ou consommateurs dâOzempic, mĂ©dicament anti-obĂ©sitĂ© qui nĂ©cessite une alimentation riche en protĂ©ines pour Ă©viter la fonte musculaire. Les linĂ©aires sâenrichissent de produits protĂ©inĂ©s inattendus : cĂ©rĂ©ales, yaourts, barres, snacks, voire desserts.
Cette stratĂ©gie rĂ©pond aussi Ă une logique marketing puissante : le mot « protĂ©ine » est devenu synonyme de santĂ©, dâĂ©nergie, de performance. Les entreprises lâintĂšgrent dans leurs packagings, slogans, publicitĂ©s, jusquâĂ en faire un argument de vente central.
Mais cet engouement soulĂšve plusieurs enjeux. Dâune part, les nutritionnistes rappellent que la majoritĂ© des AmĂ©ricains consomment dĂ©jĂ assez, voire trop de protĂ©ines, et que câest la qualitĂ© globale de lâalimentation (fibres, lĂ©gumes, modĂ©ration du sucre) qui fait dĂ©faut. Dâautre part, la course Ă la protĂ©ine pousse les industriels Ă multiplier les isolats, additifs et procĂ©dĂ©s de transformation, ce qui va parfois Ă lâencontre dâune alimentation rĂ©ellement naturelle.
Sur le plan environnemental, lâexplosion de la demande en protĂ©ines, notamment animales, interroge sur la soutenabilitĂ© du systĂšme. Les sources vĂ©gĂ©tales de protĂ©ines, comme les pois ou les lentilles, peinent encore Ă sâimposer dans les produits ultra-transformĂ©s.
En rĂ©sumĂ©, la protĂ©ine est devenue la nouvelle star du marketing nutritionnel, dans un pays Ă la recherche de repĂšres alimentaires simples. Mais cette tendance, si elle nâest pas mieux encadrĂ©e, pourrait accentuer la confusion du consommateur et dĂ©tourner lâattention des vĂ©ritables piliers dâune alimentation saine.
New York Times, Americaâs Protein Obsession Is Transforming the Dairy Industry, 16/07/2025
Lâarticle explore en profondeur comment lâobsession croissante des AmĂ©ricains pour les protĂ©ines transforme lâindustrie laitiĂšre, notamment par le biais de la valorisation du lactosĂ©rum, ou whey, un sous-produit de la fabrication du fromage. Autrefois considĂ©rĂ© comme un simple dĂ©chet ou vendu Ă bas prix pour lâalimentation animale, le lactosĂ©rum est aujourdâhui une matiĂšre premiĂšre prĂ©cieuse, transformĂ©e en poudres protĂ©inĂ©es et en ingrĂ©dients fonctionnels utilisĂ©s dans une multitude de produits de nutrition sportive ou de consommation courante.
Le reportage prend pour exemple la fromagerie familiale Nasonville Dairy, situĂ©e dans le Wisconsin, Ătat emblĂ©matique de la production laitiĂšre. Alors que le prix du lait reste bas depuis des dĂ©cennies, la transformation du whey en produits Ă haute valeur ajoutĂ©e permet Ă lâentreprise de maintenir sa rentabilitĂ©. La demande pour la protĂ©ine de lactosĂ©rum explose, portĂ©e par une population soucieuse de sa santĂ©, adepte des rĂ©gimes hyperprotĂ©inĂ©s, du fitness, ou consommatrice de mĂ©dicaments comme Ozempic qui modifient la maniĂšre de manger.
Le phĂ©nomĂšne dĂ©passe le cercle des athlĂštes : de plus en plus de consommateurs recherchent des produits riches en protĂ©ines, associĂ©s Ă des bienfaits tels que la satiĂ©tĂ©, la prĂ©servation de la masse musculaire ou la perte de poids. Ce virage pousse lâindustrie laitiĂšre Ă adapter ses infrastructures, Ă nouer des partenariats avec des entreprises de nutrition et Ă faire Ă©voluer ses prioritĂ©s. Ă Nasonville, la valorisation du lactosĂ©rum reprĂ©sente dĂ©sormais une part importante de lâactivitĂ©, et des entreprises spĂ©cialisĂ©es comme Actus Nutrition se sont dĂ©veloppĂ©es pour maximiser ce potentiel.
Toutefois, cette rĂ©orientation ne va pas sans risques. Une surproduction de whey pourrait faire chuter les prix, et la course Ă la protĂ©ine conduit Ă une standardisation croissante de lâoffre. Par ailleurs, lâimpact environnemental de la production laitiĂšre reste une prĂ©occupation majeure.
En parallĂšle, lâindustrie cherche Ă se diversifier, en valorisant Ă©galement les fromages artisanaux ou la viande bovine issue des vaches laitiĂšres. Lâarticle met ainsi en lumiĂšre un changement structurel dans lâĂ©conomie laitiĂšre amĂ©ricaine, dĂ©sormais rĂ©organisĂ©e autour dâun nouveau produit vedette : la protĂ©ine, devenue bien plus quâun simple nutriment â un vĂ©ritable moteur de transformation industrielle.
New York Times, The Hottest New Cafe Is in Someoneâs Living Room, 22/07/2025
Lâarticle met en lumiĂšre un phĂ©nomĂšne croissant : des particuliers transforment leur salon en vĂ©ritables cafĂ©s Ă©phĂ©mĂšres, accueillant amis, voisins ou abonnĂ©s des rĂ©seaux sociaux autour de boissons maison et pĂątisseries artisanales. Loin des enjeux commerciaux, ces âhome cafĂ©sâ sont avant tout des projets communautaires, souvent motivĂ©s par un besoin de lien social, une passion pour la cuisine ou une volontĂ© dâexplorer une identitĂ© crĂ©ative.
Ă Des Plaines, Illinois, Nate Crawford et Justen Lambert organisent les Ă©vĂ©nements âMorning Jaysâ : menus personnalisĂ©s, merchandising, newsletter, branding⊠tout y est, Ă lâexception du statut lĂ©gal dâun commerce. Ils voient dans ces cafĂ©s domestiques une alternative plus chaleureuse et accessible aux restaurants classiques, alliant convivialitĂ©, cuisine de qualitĂ© et faible coĂ»t.
Ă MontrĂ©al, deux jeunes femmes, Victoria Da Silva et Kate McDevitt, ont lancĂ© âSaturday CafĂ©â, un rendez-vous mensuel qui rassemble un public hĂ©tĂ©roclite, avec comme but assumĂ© de recrĂ©er du lien post-Covid. Leur concept sâest enrichi dâobjets dĂ©rivĂ©s (mugs), de collaborations avec des artisans (ateliers cĂ©ramique) et dâune forte prĂ©sence en ligne.
Dâautres exemples citĂ©s, comme celui de Ryan Nordheimer Ă New York ou de Faye Abad Ă Bristol, montrent que le mouvement est international. Il offre un espace de crĂ©ativitĂ©, sans la pression financiĂšre dâun commerce classique, tout en rĂ©pondant Ă une envie de communautĂ©, de convivialitĂ© et de simplicitĂ©. Certains hĂŽtes y trouvent mĂȘme une rampe de lancement pour une carriĂšre dans les mĂ©tiers de la food ou de la crĂ©ation de contenu.
Ce phĂ©nomĂšne reflĂšte aussi les mutations de la consommation urbaine : dans un contexte dâinflation, les consommateurs sont en quĂȘte dâalternatives au restaurant traditionnel. Lâessor de ces cafĂ©s dâappartement montre Ă quel point le besoin de lien social et dâexpĂ©rience culinaire personnalisĂ©e reste fort, mĂȘme dans un monde de plus en plus numĂ©rique.
Forbes, Coffee: The Essential âPerkâ Of A Perfect Hotel Or Resort Stay, 14/07/2025
Dans lâhĂŽtellerie de luxe, le cafĂ© nâest plus un simple service annexe, mais un levier stratĂ©gique dâexpĂ©rience client. Lâarticle de Forbes explore comment les hĂŽtels et resorts haut de gamme repensent leur offre cafĂ© pour en faire un « petit luxe » dĂ©terminant dans la perception du sĂ©jour. Le cafĂ© devient un marqueur de qualitĂ©, dâattention aux dĂ©tails et de personnalisation.
Certains Ă©tablissements nouent des partenariats exclusifs avec des torrĂ©facteurs locaux ou artisanaux, installent des Ă©quipements haut de gamme dans les chambres (machines Ă expresso, moulins Ă grains, tasses design), ou proposent des menus de cafĂ©s rares comme pour le vin. Dâautres vont plus loin, en intĂ©grant des ateliers de dĂ©gustation, des expĂ©riences sensorielles autour du cafĂ©, voire des prestations de barista Ă la demande.
Cette Ă©volution reflĂšte la montĂ©e en gamme des attentes post-Covid : les clients veulent plus dâauthenticitĂ©, de rĂ©confort, de repĂšres sensoriels. Le cafĂ© incarne parfaitement cette quĂȘte dâĂ©motion quotidienne, de rituel personnel et de rĂ©assurance. Il participe Ă lâambiance gĂ©nĂ©rale de lâhĂŽtel, du lobby au room service, en passant par les petits dĂ©jeuners ou les pauses bien-ĂȘtre.
Au-delĂ du goĂ»t, câest aussi un outil de storytelling : un cafĂ© Ă©quitable, sourcĂ© auprĂšs de coopĂ©ratives, transformĂ© sur place, raconte une histoire qui valorise lâimage de marque. Cela sâinscrit dans une tendance plus large oĂč les produits de consommation deviennent des supports dâexpĂ©rience.
Lâarticle montre que le cafĂ© est devenu, dans lâhĂŽtellerie, un indicateur de standing autant quâun acte dâhospitalitĂ©. Bien pensĂ©, il fidĂ©lise, surprend, engage. NĂ©gligĂ©, il peut laisser une impression dĂ©cevante, mĂȘme dans un Ă©tablissement cinq Ă©toiles. La nouvelle culture du cafĂ©, hĂ©ritĂ©e de la « third wave », sâimpose donc comme une opportunitĂ© pour rĂ©inventer les standards de lâaccueil.
Inc, Meet the CEO Turning Chicken Farmers Into âRock Starsâ, 02/07/2025
Dans un secteur dominĂ© par quatre gĂ©ants â Tyson Foods, Pilgrimâs Pride, Perdue Farms et Sanderson Farms â qui concentrent Ă eux seuls prĂšs de 60 % du marchĂ© amĂ©ricain de la volaille, Stephen Shepard, PDG de Farmer Focus, veut bousculer les rĂšgles du jeu. Ancien salariĂ© de lâindustrie, notamment chez Pilgrimâs Pride, Shepard a gravi les Ă©chelons depuis ses annĂ©es de lycĂ©e en occupant tous les postes, de la production Ă lâencadrement, avant de lancer sa propre entreprise. Ce parcours de terrain lui a permis de prendre conscience des limites du modĂšle industriel, notamment en matiĂšre de bien-ĂȘtre des Ă©leveurs et de durabilitĂ©.
Farmer Focus sâinscrit dans une approche totalement diffĂ©rente du modĂšle dâintĂ©gration verticale classique. PlutĂŽt que de contrĂŽler lâensemble de la chaĂźne de maniĂšre centralisĂ©e, lâentreprise collabore avec des exploitations familiales indĂ©pendantes situĂ©es en Virginie et Virginie-Occidentale. Elle leur garantit des prix dâachat 25 Ă 35 % supĂ©rieurs au marchĂ©, une transparence totale sur les conditions de production et un partenariat fondĂ© sur la confiance. Ce systĂšme est vĂ©rifiĂ© par des tiers indĂ©pendants et a permis dâattirer un nombre croissant dâĂ©leveurs â au point que lâentreprise fonctionne avec une liste dâattente, sans avoir besoin de campagnes de recrutement.
Shepard souligne que ce modĂšle rĂ©pond Ă une urgence structurelle : prĂšs de 150 000 fermes familiales ont disparu aux Ătats-Unis entre deux recensements agricoles, et 83 % des exploitants doivent travailler hors de leur ferme pour survivre. Farmer Focus veut inverser cette tendance en permettant aux Ă©leveurs de vivre dĂ©cemment de leur mĂ©tier, tout en protĂ©geant les fermes familiales sur plusieurs gĂ©nĂ©rations. PrĂšs de 20 % des fermes partenaires sont dirigĂ©es par des primo-installants, et lâentreprise favorise la transmission familiale : six exploitations ont Ă©tĂ© reprises par une nouvelle gĂ©nĂ©ration au cours des douze derniers mois.
PlutĂŽt que de dĂ©manteler lâindustrie, Stephen Shepard veut en proposer une version plus humaine, plus durable et plus Ă©quitable, en rĂ©orientant le centre de gravitĂ© du systĂšme autour de ceux qui produisent rĂ©ellement : les Ă©leveurs.
Eater, How Seedless Watermelon Took Over the Grocery Store, 24/07/2025
Lâarticle retrace lâhistoire fascinante de lâascension fulgurante de la pastĂšque sans pĂ©pins, aujourdâhui omniprĂ©sente dans les rayons des supermarchĂ©s amĂ©ricains. Initialement perçue comme une curiositĂ© botanique, cette variĂ©tĂ© triploĂŻde â stĂ©rile et donc incapable de produire des graines â a Ă©tĂ© le fruit de dĂ©cennies de recherche agronomique, popularisĂ©e dans les annĂ©es 1990 grĂące Ă des croisements complexes entre variĂ©tĂ©s diploĂŻdes et tĂ©traploĂŻdes.
Ce succĂšs commercial nâĂ©tait pas acquis dâavance. Les pastĂšques sans graines sont en effet plus difficiles Ă produire, nĂ©cessitent un environnement contrĂŽlĂ© pour la germination, des pollinisateurs spĂ©cifiques, et leur culture est plus onĂ©reuse. Cependant, leur cĂŽtĂ© pratique, notamment pour les enfants, les pique-niques ou les dĂ©coupes rapides, a rapidement conquis les consommateurs. Les efforts de communication des producteurs, associĂ©s Ă un marketing ciblĂ©, ont permis de faire de cette innovation une norme.
Aujourdâhui, plus de 90 % des pastĂšques vendues aux Ătats-Unis sont sans pĂ©pins. Cette hĂ©gĂ©monie repose sur une transformation silencieuse mais radicale du marchĂ©, dans laquelle les distributeurs ont jouĂ© un rĂŽle-clĂ© en exigeant une standardisation des produits plus pratiques Ă vendre, Ă stocker et Ă conditionner.
Mais cette rĂ©volution pose aussi des questions. Dâun point de vue agronomique, la diversitĂ© variĂ©tale sâest considĂ©rablement appauvrie. De nombreuses variĂ©tĂ©s anciennes de pastĂšques Ă graines, souvent plus rĂ©sistantes, plus savoureuses ou mieux adaptĂ©es Ă certains terroirs, ont Ă©tĂ© marginalisĂ©es, voire disparues. De plus, les semences de variĂ©tĂ©s sans pĂ©pins ne peuvent pas ĂȘtre replantĂ©es : les producteurs doivent chaque annĂ©e racheter les semences hybrides auprĂšs de multinationales, renforçant leur dĂ©pendance.
Lâarticle aborde Ă©galement les questions Ă©cologiques et Ă©thiques liĂ©es Ă ce modĂšle agricole intensif : usage dâintrants, impact environnemental, pouvoir des semenciers. La pastĂšque sans pĂ©pins devient ainsi un symbole emblĂ©matique des compromis entre innovation, confort de consommation, dĂ©pendance industrielle et perte patrimoniale.
Wall Street Journal, Why It Actually Makes Sense to Pay $40 for an OmeletâOccasionally, 25/07/2025
Longtemps relĂ©guĂ©e au statut de plat de petit-dĂ©jeuner simple et abordable, lâomelette fait un retour inattendu dans les plus grands restaurants gastronomiques amĂ©ricains⊠et au dĂźner. Ă travers une enquĂȘte menĂ©e dans plusieurs Ă©tablissements renommĂ©s, lâarticle dĂ©crypte comment ce plat humble est devenu un emblĂšme du « quiet luxury » â ce luxe discret, sobre et technique qui sĂ©duit une clientĂšle en quĂȘte dâauthenticitĂ© et de maĂźtrise culinaire.
Ă 1906, le restaurant du Longwood Gardens en Pennsylvanie, lâomelette Ă quatre Ćufs garnie de homard du Maine et nappĂ©e de bĂ©arnaise est servie au prix de 38 dollars. Le chef George Murkowicz en fait un pilier de sa carte du soir. Chez Chez Fifi Ă Manhattan, lâomelette Ă plat Ă 40 dollars est garnie de crevettes carabinero et dâoursin. Son chef, Zack Zeidman, la compare Ă une tortilla espagnole librement interprĂ©tĂ©e. Dans ces Ă©tablissements, lâomelette est Ă©levĂ©e au rang de plat signature, cĂŽtoyant filets mignons et poissons nobles.
Lâomelette devient un test culinaire et Ă©motionnel. Facile Ă reproduire chez soi, elle prend une toute autre dimension quand elle est exĂ©cutĂ©e Ă la perfection par un chef. Elle procure un sentiment dâattention, de soin, presque maternel. Chez Le Veau dâOr, lâomelette baveuse au ComtĂ© et aux herbes, issue du rĂ©pertoire Escoffier, sâintĂšgre au menu Ă 125 dollars. Pour les chefs Riad Nasr et Lee Hanson, elle incarne une Ă©lĂ©gance rĂ©confortante, parfaitement compatible avec un grand vin ou un Champagne.
Le phĂ©nomĂšne dĂ©passe la cuisine française. Ă Chez Noir en Californie, le chef Jonny Black propose une version roulĂ©e au crabe et Ă lâoursin violet local. Ă Sap Sua, restaurant vietnamien de Denver, les Ćufs doux trĂșng vĂ trĂșng sont servis sur du riz avec poisson, jalapeños marinĂ©s et Ćufs de truite. Ă Gado Gado, Ă Portland, une omelette aux herbes indonĂ©siennes enrichit le festin rijsttafel.
Ce retour en grĂące nâest pas anodin : dans un contexte oĂč les Ćufs atteignent des prix records, ils sont redĂ©couverts comme ingrĂ©dient noble. Pour les chefs, lâomelette est aussi un test de compĂ©tence, un rĂ©vĂ©lateur du savoir-faire culinaire. En somme, lâomelette se rĂ©vĂšle aujourdâhui comme le reflet dâune sophistication sans ostentation.
Câest tout pour aujourdâhui.
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A dans un mois!
O. Frey