đŸđđ Eat's business đđ·đ§ 2025-19
Bonjour Ă toutes et Ă tous, Eat's Business est une newsletter dans laquelle vous trouverez une revue de presse de quelques articles sur le monde de lâalimentaire qui mâont semblĂ© intĂ©ressants dans la semaine prĂ©cĂ©dente.
Pour ceux qui veulent la formule ristretto, les 3 articles que je vous conseille de lire en priorité cette semaine sont :
LibĂ©ration, Brownie menstruel, abats contre les carences en fer⊠Lâalimentation, une solution pour briser le cycle vicieux, 31/05/2025
The Grocer, ChatGPT: the next major shift in online grocery shopping, 30/05/2025
Financial Times, Tome sweet tome: Londonâs best bookshop bars, 27/05/2025
Bonne lecture et bonne semaine Ă toutes et Ă tous!
Pour celles et ceux dâentre vous qui ont plus de temps pour la formule lungo :
Le Monde, La noisette, la petite filiÚre emblÚme des défenseurs des néonicotinoïdes, 26/05/2025
Face aux restrictions pesant sur les produits phytosanitaires, notamment les nĂ©onicotinoĂŻdes interdits depuis 2018, la filiĂšre française de la noisette a Ă©tĂ© mise en avant par les dĂ©fenseurs de leur rĂ©autorisation, notamment dans le cadre de la proposition de loi « PPL Duplomb ». LâacĂ©tamipride, insecticide de la mĂȘme famille, pourrait ĂȘtre rĂ©introduit pour protĂ©ger les vergers contre divers ravageurs, illustrant les limites techniques dâune agriculture sans ces substances.
Pourtant, cette microfiliĂšre reste marginale : elle reprĂ©sente Ă peine 7 900 hectares cultivĂ©s et environ 350 producteurs, loin des 400 000 hectares de betteraves sucriĂšres, autre culture friande de nĂ©onicotinoĂŻdes. Lâinfluence de la noisette dans le dĂ©bat semble donc disproportionnĂ©e, mĂȘme si son poids symbolique est fort. La coopĂ©rative Unicoque, avec Ferrero comme client principal (25 % de son chiffre dâaffaires), illustre Ă quel point cette filiĂšre est orientĂ©e vers lâindustrie agroalimentaire.
Depuis les annĂ©es 2000, les plantations de noisetiers ont connu un regain, accompagnĂ©es dâinitiatives techniques pour pallier le manque dâintĂ©rĂȘt des fournisseurs phytosanitaires. Le balanin, insecte nuisible Ă lâamandon, et la punaise diabolique, parasite originaire dâAsie, menacent les rĂ©coltes et exigent des stratĂ©gies de lutte innovantes. MalgrĂ© une dĂ©rogation temporaire en 2018, la production est restĂ©e instable, en raison aussi dâalĂ©as climatiques comme les gels de printemps en 2021 et 2022.
En 2025, les producteurs ont obtenu une nouvelle dĂ©rogation pour trois insecticides dont la deltamĂ©thrine, et un projet de recherche sur cinq ans a Ă©tĂ© lancĂ© pour dĂ©velopper des alternatives, dotĂ© de 7,5 millions dâeuros.
Cependant, toute la filiĂšre ne plaide pas pour le retour des nĂ©onicotinoĂŻdes. Damien Philibert, producteur bio en IsĂšre, dĂ©fend une approche alternative : il cultive une variĂ©tĂ© rĂ©sistante au balanin et lutte contre la punaise Ă lâaide de phĂ©romones et dâargile calcinĂ©e. Sa premiĂšre rĂ©colte bio a atteint 750 kg pour 3 hectares, et il vise une productivitĂ© de 1 Ă 1,5 tonne par hectare. Son parcours incarne la transition possible vers une noisiculture durable, sans insecticides de synthĂšse.
LibĂ©ration, Brownie menstruel, abats contre les carences en fer⊠Lâalimentation, une solution pour briser le cycle vicieux, 31/05/2025
Cet article explore un mouvement croissant, portĂ© par des femmes, des nutritionnistes et des influenceuses, qui vise Ă adapter lâalimentation en fonction des cycles hormonaux fĂ©minins. Lâobjectif : soulager des troubles tels que le syndrome prĂ©menstruel (SPM), le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) ou encore lâendomĂ©triose, en modifiant le contenu de lâassiette selon les diffĂ©rentes phases du cycle menstruel.
Alexia, une trentenaire, témoigne de la disparition de son SPM aprÚs avoir adapté son alimentation en 2023. Une approche confirmée par des recherches, comme celles publiées dans la revue Frontiers en 2023, qui soulignent le rÎle central des carences nutritionnelles et des fluctuations hormonales dans ces troubles.
La nutritionniste Anaïs Da Silva, dans son ouvrage Bien manger au fil de son cycle, recommande une « alimentation hormonale » en trois phases : folliculaire, ovulatoire et lutéale. Chaque période requiert un apport spécifique en nutriments. Par exemple, pendant les rÚgles, une alimentation riche en fer (lentilles, abats, viande rouge) est conseillée pour compenser la perte sanguine.
Rebecca Attali, ingĂ©nieure en alimentation atteinte du SOPK, raconte comment un changement de rĂ©gime, notamment la rĂ©duction du sucre, a transformĂ© son quotidien aprĂšs lâĂ©chec de plusieurs traitements hormonaux. Elle a ensuite fondĂ© le compte Instagram @spoon_of_becca, qui propose des recettes comme le « brownie menstruel », riche en fer et magnĂ©sium. En quelques mois, elle rassemble plus de 70 000 abonnĂ©s et contribue Ă une nouvelle pĂ©dagogie alimentaire.
Les tĂ©moignages de femmes atteintes dâendomĂ©triose abondent dans le mĂȘme sens. AmaĂ©, diagnostiquĂ©e en 2023, a vu ses douleurs disparaĂźtre en seulement deux cycles aprĂšs avoir Ă©liminĂ© gluten et alcool. Bien que ces rĂ©gimes nâaient pas valeur de traitement, ils soulagent les symptĂŽmes. Les professionnelles de santĂ©, comme la diĂ©tĂ©ticienne Laura Compagne ou la mĂ©decin Candice Bertheas, insistent toutefois sur la nĂ©cessitĂ© dâun accompagnement personnalisĂ© pour Ă©viter les dĂ©rives restrictives ou orthorexiques.
Cette dynamique, encore peu reconnue par le corps mĂ©dical traditionnel, offre une voie prometteuse pour amĂ©liorer la qualitĂ© de vie de nombreuses femmes. Mais elle soulĂšve aussi des enjeux dâaccessibilitĂ©, de fiabilitĂ© des contenus, et appelle Ă une meilleure intĂ©gration de la nutrition hormonale dans les formations de santĂ©.
LibĂ©ration, Pouvoir dâachat : dans les restaurants, des «menus anticrise» pour rebattre les cartes, 02/06/2025
Dans un contexte dâinflation persistante, de tensions sur le pouvoir dâachat et dâune baisse de frĂ©quentation, de nombreux restaurateurs français lancent des « menus anticrise » Ă prix cassĂ©s pour reconquĂ©rir leur clientĂšle et affronter une conjoncture difficile. Lâarticle explore les stratĂ©gies mises en Ćuvre par le secteur pour rester attractif tout en maintenant une viabilitĂ© Ă©conomique.
Ă Paris comme en province, des Ă©tablissements revoient leurs cartes avec des formules dĂ©jeuner Ă moins de 20 âŹ, des menus Ă thĂšme Ă prix rĂ©duits, ou des plats « malins » conçus Ă partir de produits de saison, locaux et bon marchĂ©. Cette approche permet de rĂ©duire les coĂ»ts matiĂšres tout en mettant en avant la crĂ©ativitĂ© des chefs.
Certains restaurateurs sâappuient sur des filiĂšres courtes, dâautres collaborent avec des plateformes comme Too Good To Go ou La Fourchette pour optimiser la rotation et limiter le gaspillage. Le recours Ă des produits moins nobles mais bien travaillĂ©s (abats, lĂ©gumes oubliĂ©s, morceaux secondaires de viande) permet de valoriser des ressources tout en tenant les prix. Le tout dans une logique assumĂ©e de gastronomie accessible et durable.
Cette dynamique sâaccompagne souvent dâune communication transparente. Le restaurateur devient pĂ©dagogue : il explique lâorigine des produits, les choix budgĂ©taires et lâimportance de soutenir lâĂ©conomie locale. On assiste Ă une forme de repolitisation de lâassiette, oĂč manger devient aussi un acte citoyen.
Toutefois, ce modĂšle reste fragile. Les charges fixes (loyers, salaires, Ă©nergie) pĂšsent lourd. Certains professionnels dĂ©noncent un effet vitrine oĂč seuls les Ă©tablissements les plus mĂ©diatisĂ©s peuvent se permettre ces offres attractives. Pour beaucoup, maintenir des prix bas implique des sacrifices sur les marges, la masse salariale ou la qualitĂ©. Le risque est alors de tirer toute la profession vers le bas.
MalgrĂ© tout, ces initiatives sont perçues comme une bouffĂ©e dâair dans un paysage sinistrĂ©. Elles tĂ©moignent dâune volontĂ© de rĂ©inventer le rapport au client, dâinstaurer une relation de confiance et de fidĂ©litĂ©, et de repenser le modĂšle Ă©conomique de la restauration, au-delĂ des logiques purement gastronomiques.
Lâenjeu pour demain : parvenir Ă concilier accessibilitĂ©, rentabilitĂ© et exigence culinaire, sans renier lâidentitĂ© de la cuisine française ni prĂ©cariser davantage ses artisans.
Les Ăchos, Comment Lavazza surmonte la flambĂ©e des prix sur le marchĂ© du cafĂ©, 03/06/2025
Face Ă une flambĂ©e historique des cours du cafĂ©, Lavazza a rĂ©ussi Ă prĂ©server sa rentabilitĂ© en 2024, malgrĂ© un contexte Ă©conomique extrĂȘmement tendu. La hausse vertigineuse des prix du cafĂ© â due Ă la combinaison de mauvaises rĂ©coltes (au BrĂ©sil et au Vietnam), de perturbations logistiques (canal de Suez) et de spĂ©culations â a fait passer les coĂ»ts dâachat du groupe de 600 millions dâeuros en 2019 Ă 1,6 milliard en 2024, sans variation de volume.
Pour rĂ©sister, le groupe a lancĂ© une sĂ©rie de mesures offensives : rĂ©duction des stocks (passĂ©s de neuf Ă six mois), optimisation des emballages et de lâĂ©nergie, et chasse systĂ©matique aux coĂ»ts, sans toucher Ă ses effectifs ni Ă ses investissements. Cette stratĂ©gie a permis Ă Lavazza dâabsorber une surcharge de 600 millions dâeuros en 2024. Le rĂ©sultat : un Ebitda en hausse de 18,6 % (312 millions dâeuros), un bĂ©nĂ©fice net Ă +20,6 %, et un chiffre dâaffaires en progression de 9 % Ă 3,35 milliards. NĂ©anmoins, la marge reste infĂ©rieure Ă celle de 2022 (9,3 % contre 11 %).
La hausse des prix sâest inĂ©vitablement rĂ©percutĂ©e sur les consommateurs. En France, le paquet de cafĂ© moulu Carte Noire est passĂ© de 6 Ă 9 euros depuis 2023, entraĂźnant une baisse des volumes vendus de 1,8 %, alors que le marchĂ© global restait stable. Lavazza a modĂ©rĂ© les hausses sur les capsules et le cafĂ© en grain, plus onĂ©reux, mais nâĂ©chappe pas Ă la montĂ©e du phĂ©nomĂšne de âtrading downâ, oĂč les consommateurs se tournent vers des marques moins chĂšres.
Giuseppe Lavazza insiste sur un changement de paradigme : « Pendant 130 ans, la prioritĂ© Ă©tait les volumes ; aujourdâhui, il faut penser valeur. » Il espĂšre que le recul de la demande entraĂźnera Ă terme un rééquilibrage des cours mondiaux.
MalgrĂ© les turbulences, Lavazza reste proactif Ă lâinternational. Aux Ătats-Unis, il vise 1 milliard dâeuros de chiffre dâaffaires dâici trois ans, dopĂ© par la production locale. En Chine, une coentreprise vise lâouverture de 1 000 coffee shops dâici 2028. En France, premier marchĂ© europĂ©en, le groupe investit dans le hors domicile premium, livrant notamment la moitiĂ© des palaces Ă©toilĂ©s. Ce segment reprĂ©sente dĂ©jĂ 20 % de son activitĂ© française.
Le Monde, Gabriel Lepousez, neurobiologiste : « Pour le vin, notre cerveau va fortement fonder son jugement sur la couleur », 24/05/2025
Dans cet article, le neurobiologiste Gabriel Lepousez, spĂ©cialiste de la perception sensorielle, explique comment la vue domine notre expĂ©rience de dĂ©gustation du vin. Si le rituel du vin valorise tous les sens â observation de la robe, olfaction, goĂ»t â, câest en rĂ©alitĂ© la couleur perçue qui influence le plus fortement le jugement du dĂ©gustateur.
Gabriel Lepousez rappelle que lâĂȘtre humain, espĂšce essentiellement diurne, a vu ses capacitĂ©s visuelles Ă©voluer de maniĂšre prĂ©dominante. Le cortex visuel mobilise 15 % de lâactivitĂ© cĂ©rĂ©brale contre Ă peine 1 % pour les stimulations olfactives ou gustatives. Ainsi, notre cerveau hiĂ©rarchise les informations sensorielles en donnant la prioritĂ© Ă ce que perçoivent nos yeux.
Cette prééminence visuelle induit des biais cognitifs. Par exemple, des expériences ont montré que colorer un vin blanc en rouge modifie les descripteurs utilisés par les dégustateurs, qui adoptent alors le vocabulaire associé aux rouges. La mémoire associative joue aussi un rÎle : le rouge évoque la maturité, la puissance, tandis que des couleurs claires comme le rosé pùle sont perçues comme plus légÚres.
Gabriel Lepousez dĂ©nonce la maniĂšre dont ces attentes visuelles orientent le langage du vin, parfois au dĂ©triment de la rĂ©alitĂ© organoleptique. Ainsi, face Ă un arĂŽme dâorange dans un vin rouge, le cerveau prĂ©fĂšre « orange sanguine », terme plus cohĂ©rent avec la couleur perçue. Cette distorsion influence aussi les comportements dâachat, notamment pour les rosĂ©s, dont les teintes pĂąles, perçues comme plus fines, sont devenues dominantes sur le marchĂ©.
Le scientifique recommande des dĂ©gustations en aveugle, voire avec un verre noir ou les yeux fermĂ©s, pour redonner sa juste place Ă lâodorat et au goĂ»t. Il Ă©voque Ă©galement dâautres biais, comme lâeffet de lâĂ©tiquette, du prix ou des rĂ©compenses. Une Ă©tude californienne citĂ©e montre que le mĂȘme vin, proposĂ© Ă 5 ou Ă 50 dollars, est mieux notĂ© lorsquâil est plus cher, sans diffĂ©rence rĂ©elle de perception sensorielle.
Le Monde, Blanc sur rouge, ainsi vint le blouge, 24/05/2025
Lâarticle sâintĂ©resse Ă un phĂ©nomĂšne Ă©mergent dans le monde viticole : le âblougeâ, contraction de âblancâ et ârougeâ, dĂ©signant des vins issus de lâassemblage de cĂ©pages blancs et noirs. Bien que cette pratique soit encore marginale dans les appellations contrĂŽlĂ©es, elle connaĂźt un regain de popularitĂ© dans les vins de France, notamment dans le segment des vins nature.
Apparu rĂ©cemment dans le vocabulaire Ćnologique, le terme recouvre une tradition plus ancienne, particuliĂšrement dans le sud de la France. Face aux effets du rĂ©chauffement climatique et Ă la tendance des vins rouges trĂšs puissants et tanniques, les vignerons cherchent Ă rĂ©pondre Ă la demande croissante pour des vins plus frais, plus lĂ©gers et plus accessibles, tant en bouche quâen prix.
Le âblougeâ incarne cette rĂ©ponse. Il permet dâadoucir les rouges tout en apportant de lâaciditĂ© et de la complexitĂ© aromatique. Des domaines comme celui de Laballe dans les Landes, qui a assemblĂ© chenin et syrah en parts Ă©gales, ou Peybonhomme-les-Tours en Gironde, qui mĂȘle sĂ©millon et cabernet franc, montrent la diversitĂ© des approches. Le rĂ©sultat : des vins conviviaux, souples, Ă la robe limpide, souvent fruitĂ©s, destinĂ©s Ă lâapĂ©ritif ou Ă accompagner des plats estivaux.
Le marketing joue Ă©galement un rĂŽle important : certains vignerons revendiquent lâappellation âblougeâ avec humour et lĂ©gĂšretĂ©. Cette nouvelle catĂ©gorie, Ă mi-chemin entre le rouge et le blanc, sĂ©duit notamment la restauration, toujours en quĂȘte de propositions originales, et un public curieux, parfois indĂ©cis entre rouge ou blanc.
Chaque domaine dĂ©veloppe sa propre mĂ©thode de vinification : vendanges simultanĂ©es, macĂ©rations mixtes, pressurages diffĂ©renciĂ©s⊠Certains vont jusquâĂ revendiquer un âblougeâ Ă base exclusive de raisins noirs, vinifiĂ©s de maniĂšre originale, comme au domaine Villa Minna dans les Bouches-du-RhĂŽne.
Le âblougeâ illustre une Ă©volution des codes et des usages du vin, avec une plus grande libertĂ© de crĂ©ation hors des carcans des appellations traditionnelles. Il rĂ©pond aussi Ă une demande croissante pour des vins hybrides, ludiques, faciles Ă boire, et sâinscrit dans une dynamique plus large de rĂ©invention du vin pour les jeunes consommateurs.
LSA, Marques centenaires du petit dĂ©jeuner : Le Gall perpĂ©tue lâart du beurre sur les cĂŽtes bretonnes, 04/06/2025
Depuis plus dâun siĂšcle, la Maison Le Gall, implantĂ©e Ă Quimper (FinistĂšre), incarne le savoir-faire traditionnel du beurre artisanal breton. FondĂ©e en 1923, cette entreprise familiale a su prĂ©server son identitĂ© tout en Ă©voluant avec son temps. CertifiĂ©e Entreprise du patrimoine vivant en 2023, elle perpĂ©tue une mĂ©thode de fabrication fondĂ©e sur la maturation naturelle au levain et un barattage lent, processus exigeant et long qui distingue ses produits dans le paysage laitier français.
Lâarticle met en lumiĂšre les spĂ©cificitĂ©s techniques de cette mĂ©thode artisanale : la crĂšme maturĂ©e pendant 15 Ă 18 heures dĂ©veloppe des arĂŽmes subtils de noisette, avant dâĂȘtre barattĂ©e dĂ©licatement en tonneau, ce qui donne au beurre sa texture souple et homogĂšne. Cette attention portĂ©e Ă chaque Ă©tape de la fabrication repose sur lâexpertise de maĂźtres beurriers qui se transmettent leur savoir-faire en interne.
Le Gall se fournit exclusivement en lait auprĂšs de producteurs locaux finistĂ©riens, dont 85 exploitations bio, dans le cadre de son appartenance au groupe Sill depuis 1998. Lâentreprise dĂ©cline ses produits en une quarantaine de rĂ©fĂ©rences â beurres doux, demi-sel, cristaux de sel â disponibles en formats variĂ©s, du beurrier carton Ă la plaquette traditionnelle.
Consciente des nouvelles attentes des consommateurs, la marque mise sur lâinnovation dans le respect des traditions. Elle dĂ©veloppe notamment des mini-beurriers aromatisĂ©s pour sĂ©duire les jeunes gĂ©nĂ©rations, tout en engageant une transition vers des emballages plus durables. Une nouvelle charte graphique, un papier plus Ă©cologique et une plateforme de communication orientĂ©e vers la pĂ©dagogie autour de ses process sont prĂ©vus pour lâautomne 2025.
MalgrĂ© un marchĂ© du petit-dĂ©jeuner en mutation â entre nouvelles habitudes, snacking et prĂ©occupations santĂ© â Le Gall conserve une clientĂšle fidĂšle grĂące Ă la qualitĂ© constante de ses produits. Son positionnement premium, alliant terroir, authenticitĂ© et innovation, lui permet aussi de conquĂ©rir des marchĂ©s Ă lâexport, notamment en Europe, Asie, Moyen-Orient et aux Ătats-Unis.
Avec un chiffre dâaffaires de 86 millions dâeuros en 2024 (+7,8 %) et 50 % de ses rĂ©fĂ©rences certifiĂ©es bio, la Maison Le Gall illustre parfaitement comment une entreprise patrimoniale peut Ă©voluer tout en gardant une forte cohĂ©rence identitaire.
LSA, Bjorg : comment Ecotone travaille lâimage et lâoffre de sa marque bio pour cibler les jeunes, 01/06/2025
La marque Bjorg, pilier du groupe Ecotone (anciennement Distriborg), poursuit sa stratĂ©gie de relance et de rajeunissement, dans un contexte oĂč la consommation bio Ă©volue. MalgrĂ© un marchĂ© sous tension, Bjorg affiche une croissance de +2,2 % en 2024 avec 180 millions dâeuros de chiffre dâaffaires, soit 25 % du CA du groupe, grĂące Ă une diversification de ses produits et un repositionnement ciblĂ© vers les jeunes adultes.
Depuis sa crĂ©ation Ă Lyon en 1988, la marque Bjorg a connu plusieurs Ă©volutions, devenant leader sur des segments comme les boissons vĂ©gĂ©tales (59,5 % de parts de marchĂ©), les cĂ©rĂ©ales bio du petit-dĂ©jeuner (49,2 %) ou encore les biscuits bio (46,1 %). Face Ă une perte de clientĂšle senior en 2023 due Ă lâinflation, la marque concentre dĂ©sormais ses efforts sur les moins de 35 ans, en adaptant ses produits, ses prix et sa communication.
Lâaxe stratĂ©gique repose sur deux piliers : lâinnovation produit et lâengagement environnemental. Sur le plan produit, Bjorg dĂ©veloppe de nouvelles boissons vĂ©gĂ©tales aux profils gustatifs attractifs pour les jeunes (avoine-vanille, avoine-amande, barista amande), ainsi que des cĂ©rĂ©ales sans sucre ajoutĂ© et des biscuits pour le snacking. La marque mise aussi sur une nutrition fonctionnelle pour rĂ©pondre Ă des besoins spĂ©cifiques : produits protĂ©inĂ©s, cĂ©rĂ©ales crunchy, etc.
CÎté environnemental, Ecotone multiplie les actions concrÚtes : réduction des emballages, bouchons en canne à sucre, affichage du Planet-score, retrait du Nutri-score sur les packagings (tout en le conservant en ligne). La marque affirme ainsi son positionnement militant pour une alimentation bio, végétale, sans pesticides et transparente.
La stratĂ©gie de communication sâest aussi adaptĂ©e avec la plateforme « Bjorg to be alive », plus Ă©motionnelle et conviviale, diffusĂ©e Ă la tĂ©lĂ©vision en plusieurs vagues, et fortement relayĂ©e sur les rĂ©seaux sociaux.
Enfin, Bjorg sâouvre Ă de nouveaux circuits de distribution, notamment la restauration (10 % du CA Ecotone), les coffee shops (avec une gamme barista), lâe-commerce (13 % du CA europĂ©en) et les plateformes comme Amazon et Picnic. Clipper, lâautre marque phare dâEcotone, est dĂ©sormais servie dans tous les McDonaldâs en France.
Ce renouvellement de Bjorg illustre un repositionnement agile et offensif dâune marque historique du bio face Ă la transformation des comportements alimentaires et Ă une concurrence accrue.
Le Monde, La filiĂšre du cognac, fragilisĂ©e par les taxes amĂ©ricaines et chinoises, sâinterroge sur son avenir, 06/06/2025
La filiĂšre du cognac traverse une crise majeure sous lâeffet combinĂ© de tensions gĂ©opolitiques et de retournements de marchĂ©. La Chine, principal dĂ©bouchĂ© du spiritueux français, prĂ©voit dâappliquer au 5 juillet des droits de douane dĂ©finitifs allant de 35 Ă 39 %, en rĂ©ponse aux taxes europĂ©ennes sur les voitures Ă©lectriques chinoises. Aux Ătats-Unis, les droits de douane de 10 % imposĂ©s depuis avril pourraient ĂȘtre renforcĂ©s si les nĂ©gociations commerciales avec lâUnion europĂ©enne Ă©chouent dâici le 9 juillet. Ces menaces crĂ©ent une situation dâincertitude sans prĂ©cĂ©dent pour un produit dont 80 % des ventes se concentrent sur ces deux marchĂ©s.
Bernard Arnault, dont le groupe dĂ©tient la marque Hennessy, Ă©voque un « risque majeur » pour lâĂ©cosystĂšme du cognac, qui fait vivre environ 80 000 personnes en Charente. Les effets de la crise se font dĂ©jĂ sentir : les rendements ont Ă©tĂ© revus Ă la baisse trois annĂ©es de suite, passant de 14,7 Ă 7,65 hectolitres dâalcool pur par hectare entre 2022 et 2025. Les maisons de nĂ©goce rĂ©duisent leurs commandes jusquâĂ -45 %, activant les clauses contractuelles prĂ©vues en cas de conjoncture dĂ©favorable.
Pour faire face Ă cette baisse de la demande, lâinterprofession a mis en place un plan dâadaptation du vignoble, autorisant lâarrachage temporaire de vignes afin de diminuer les coĂ»ts de production. Ce redimensionnement progressif du parc viticole vise Ă maintenir les trĂ©soreries tout en prĂ©servant la possibilitĂ© de replantation future. La chute du prix des vignes reflĂšte la gravitĂ© de la situation : un hectare valorisĂ© jusquâĂ 100 000 euros il y a peu peut dĂ©sormais perdre jusquâĂ 50 % de sa valeur sans contrat dâachat associĂ©.
Les grands groupes tentent de redresser la barre par des restructurations internes. LVMH a changé de direction à Moët Hennessy, Rémy Cointreau a suspendu ses objectifs 2029-2030, et Pernod Ricard a renouvelé ses équipes dirigeantes dans la branche cognac. Des plans sociaux sont en cours : 1 200 suppressions de postes chez LVMH, chÎmage partiel chez Rémy Cointreau, licenciements chez Camus.
La consommation, elle aussi, sâeffrite. Aux Ătats-Unis, lâeuphorie post-Covid a laissĂ© place Ă une contraction du marchĂ© liĂ©e Ă lâinflation. En Chine, la morositĂ© Ă©conomique pĂšse sur la demande. RĂ©sultat : les ventes mondiales sont passĂ©es de 223 millions de bouteilles en 2021 Ă seulement 165 millions en 2023. Les ambitions de porter la production Ă 350 millions de bouteilles dâici 2035 apparaissent dĂ©sormais irrĂ©alistes.
Selon Florent Morillon, prĂ©sident du Bureau national interprofessionnel du cognac, mĂȘme dans lâhypothĂšse optimiste dâun apaisement diplomatique, il faudra deux Ă trois ans pour que le secteur se stabilise. La baisse structurelle de la consommation apparaĂźt comme un dĂ©fi durable, exigeant une refondation stratĂ©gique profonde de la filiĂšre.
Le Monde, DerriĂšre les 100 ans de lâappellation roquefort, la mainmise de lâagro-industrie et une Ă©rosion des ventes, 07/06/2025
Ă lâoccasion du centenaire de lâappellation dâorigine Roquefort, cĂ©lĂ©brĂ©e les 7 et 8 juin Ă Roquefort-sur-Soulzon, lâarticle dresse un tableau contrastĂ© de ce symbole de la gastronomie française. Si le fromage au lait cru de brebis, affinĂ© dans les caves naturelles du Larzac, jouit dâun prestige historique et culturel, la rĂ©alitĂ© actuelle de sa production est marquĂ©e par une industrialisation massive, une concentration Ă©conomique et une baisse continue des ventes.
Trois grands groupes â Lactalis, Savencia (Papillon) et Sodiaal (La Pastourelle) â contrĂŽlent dĂ©sormais plus de 95 % de la production. Lactalis, propriĂ©taire de la marque SociĂ©tĂ©, fabrique Ă lui seul prĂšs de 80 % des 14 400 tonnes produites en 2023. Le groupe est omniprĂ©sent dans le village de Roquefort : foncier, usine, restaurant dâentreprise, infrastructures sportives⊠Le maire reconnaĂźt que, hors le cimetiĂšre, presque tout appartient Ă Lactalis.
Les ventes, elles, déclinent réguliÚrement : de 18 000 tonnes en 2007 à 14 400 en 2023, malgré les tentatives de redynamisation menées par la Confédération générale du roquefort. Face à cette érosion, certaines maisons artisanales, comme celle de Delphine Carles, misent sur le haut de gamme et les procédés traditionnels (Penicillium cultivé sur pain, affinage long). Mais ces initiatives restent minoritaires face à une logique industrielle ciblant les grandes surfaces.
La profession fait Ă©galement face Ă une baisse dramatique du nombre dâĂ©leveurs : de 4 000 dans les annĂ©es 1980 Ă 1 330 aujourdâhui. Le prix du lait, fixĂ© par les industriels, est rĂ©guliĂšrement contestĂ©. Les Ă©leveurs dĂ©noncent une perte dâautonomie dans un systĂšme oĂč Lactalis, majoritaire, influence aussi la gouvernance interprofessionnelle. En parallĂšle, lâorientation de certaines productions vers dâautres fromages (Lou PĂ©rac, feta, bleu des Causses) accentue cette perte dâidentitĂ©.
Alors que les marques misent sur la modernisation, lâimage du roquefort pĂątit dâun dĂ©sĂ©quilibre croissant entre discours patrimonial et logique industrielle. Les tensions gĂ©opolitiques actuelles (droits de douane amĂ©ricains et potentiels droits chinois) menacent en outre un secteur dont 28 % des ventes sont rĂ©alisĂ©es Ă lâexport, notamment vers les Ătats-Unis.
Enfin, malgrĂ© la renommĂ©e mondiale du fromage, Roquefort-sur-Soulzon perd progressivement ses habitants et son tissu Ă©conomique local, au profit dâun modĂšle concentrĂ©, tournĂ© vers lâexportation mais fragile face Ă la volatilitĂ© du marchĂ© et aux dynamiques de dĂ©saffection alimentaire.
The Guardian, AI tool trial could save equivalent of 1.5m meals in food waste, 27/05/2025
Un essai pilote menĂ© au Royaume-Uni montre comment lâintelligence artificielle peut devenir un outil puissant dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Un programme testĂ© dans des Ă©tablissements de restauration collective a permis de prĂ©venir le gaspillage de lâĂ©quivalent de 1,5 million de repas, grĂące Ă une meilleure gestion des stocks, des portions et des prĂ©visions de consommation.
Lâinitiative repose sur lâoutil IA dĂ©veloppĂ© par la start-up Winnow, dĂ©jĂ active dans plusieurs hĂŽtels, cantines scolaires et hĂŽpitaux. Le principe est simple : Ă lâaide de capteurs et dâune camĂ©ra connectĂ©e Ă une IA, les dĂ©chets alimentaires sont identifiĂ©s, pesĂ©s et analysĂ©s en temps rĂ©el. Cela permet aux cuisiniers de suivre avec prĂ©cision ce qui est jetĂ©, dâen comprendre les causes et dâadapter les achats et la prĂ©paration des repas.
Lors du projet pilote, menĂ© en partenariat avec le gouvernement britannique, plusieurs Ă©tablissements publics ont vu leurs dĂ©chets baisser jusquâĂ 40 %. Ce succĂšs sâinscrit dans une politique plus large du Royaume-Uni pour atteindre ses objectifs de rĂ©duction du gaspillage alimentaire de 50 % dâici 2030, conformĂ©ment aux engagements des Nations Unies.
Les Ă©conomies ne sont pas seulement environnementales : les Ă©tablissements ont constatĂ© des rĂ©ductions de coĂ»ts significatives, renforçant lâintĂ©rĂȘt Ă©conomique de ces technologies. Le gaspillage Ă©vitĂ© permet aussi de libĂ©rer des ressources alimentaires qui pourraient nourrir des publics prĂ©caires.
Cependant, le dĂ©ploiement gĂ©nĂ©ralisĂ© de ces outils soulĂšve certaines prĂ©occupations. Le coĂ»t dâinstallation initial peut ĂȘtre un frein pour les petites structures. Il existe Ă©galement des inquiĂ©tudes sur lâusage et la sĂ©curisation des donnĂ©es, notamment dans les environnements publics.
Pour ses dĂ©fenseurs, cette technologie permet de conjuguer efficacitĂ© logistique, impact Ă©cologique et responsabilitĂ© sociale. Elle incarne une nouvelle gĂ©nĂ©ration de solutions basĂ©es sur lâIA, qui sâattaquent Ă des problĂšmes concrets et systĂ©miques, tout en favorisant une culture de durabilitĂ© dans le secteur alimentaire.
Lâarticle souligne enfin que ce modĂšle pourrait ĂȘtre reproduit Ă grande Ă©chelle, notamment en Europe et dans les pays industrialisĂ©s, oĂč le gaspillage en restauration collective reste un problĂšme majeur, peu visibilisĂ© mais aux consĂ©quences lourdes.
The Guardian, From matcha lattes to Dubai chocolate â how supermarkets fight to cope with TikTok trends, 24/05/2025
Lâarticle explore comment les tendances virales sur TikTok bouleversent la chaĂźne dâapprovisionnement des supermarchĂ©s britanniques, contraints de sâadapter Ă une demande aussi soudaine quâimprĂ©visible. Des produits comme les matcha lattes, les âprotein yoghurtsâ ou encore les fameuses tablettes de chocolat de DubaĂŻ connaissent des pics de popularitĂ© fulgurants dĂšs quâils deviennent viraux sur la plateforme.
Les chaĂźnes de grande distribution anglaises comme Tesco, Asda ou Sainsburyâs doivent dĂ©sormais intĂ©grer dans leur veille commerciale et marketing les signaux faibles des rĂ©seaux sociaux. Des Ă©quipes sont spĂ©cifiquement chargĂ©es de surveiller TikTok afin de repĂ©rer rapidement les produits tendance et ajuster les commandes en consĂ©quence. Ce phĂ©nomĂšne, surnommĂ© le « TikTok effect », peut provoquer des ruptures de stock en quelques jours, voire en quelques heures.
Lâexemple des tablettes âDubai chocolateâ illustre bien cette mutation : ces confiseries importĂ©es, popularisĂ©es par des influenceurs britanniques, ont dĂ©clenchĂ© une frĂ©nĂ©sie dâachat inattendue, poussant les enseignes Ă sĂ©curiser de nouveaux canaux dâapprovisionnement Ă la hĂąte. MĂȘme constat avec le âfeta pastaâ ou les boissons Ă base de matcha, qui enregistrent des pics de ventes dĂšs quâune vidĂ©o virale les met en avant.
Les marques indĂ©pendantes et les producteurs artisanaux, souvent mis en lumiĂšre par ces vidĂ©os, peuvent ainsi connaĂźtre une explosion de visibilitĂ© sans pouvoir toujours suivre la cadence de production, ce qui crĂ©e des tensions logistiques mais aussi des opportunitĂ©s commerciales inĂ©dites. En rĂ©ponse, certains distributeurs lancent leurs propres produits âTikTok readyâ, adaptĂ©s visuellement et gustativement aux standards du rĂ©seau social.
Cette transformation soulĂšve aussi des dĂ©fis : la volatilitĂ© des tendances complique la planification et gĂ©nĂšre du gaspillage potentiel si la hype retombe trop vite. De plus, elle bouleverse les logiques classiques du marketing alimentaire, oĂč la demande est aujourdâhui dictĂ©e par des algorithmes plus que par les campagnes publicitaires traditionnelles.
Les enseignes se trouvent face Ă une Ă©quation inĂ©dite : comment rĂ©agir vite sans perdre en qualitĂ© ni en marge, tout en construisant une relation de confiance avec des consommateurs volatiles mais ultra-connectĂ©s ? Lâarticle montre que les gĂ©ants de la distribution nâont plus le choix : TikTok est devenu un acteur incontournable de lâalimentation moderne.
The Grocer, ChatGPT: the next major shift in online grocery shopping, 30/05/2025
LâintĂ©gration rĂ©cente de fonctionnalitĂ©s dâachat dans ChatGPT pourrait bien transformer en profondeur les habitudes de consommation en ligne. Le chatbot dâOpenAI propose dĂ©sormais, en plus de rĂ©ponses classiques, des recommandations de produits alimentaires et des liens directs vers des enseignes partenaires, le tout via une interface conversationnelle. Un utilisateur demandant « un dĂźner sain pour moins de 5 ÂŁ » obtient une recette, les ingrĂ©dients associĂ©s, et peut les acheter immĂ©diatement en ligne grĂące Ă un bouton « Acheter ».
Avec plus de 400 millions dâutilisateurs hebdomadaires, lâimpact potentiel est massif. Selon Nina Goli (Modern Citizens), cette Ă©volution « explose lâentonnoir dâachat traditionnel » en rendant lâexpĂ©rience plus rapide, intuitive et directe. Contrairement Ă un moteur de recherche oĂč lâon compare entre plusieurs onglets, ChatGPT dĂ©livre une rĂ©ponse structurĂ©e et prĂȘte Ă lâachat.
Pour les marques, lâenjeu devient dâexister dans les rĂ©ponses de lâIA, via une nouvelle stratĂ©gie baptisĂ©e LLM-EO (Large Language Model Engine Optimisation). Celle-ci consiste Ă formuler les fiches produits de maniĂšre naturelle et informative, adaptĂ©e Ă un langage oral. Des descriptions gĂ©nĂ©riques comme « bon et pratique » risquent de ne pas ĂȘtre sĂ©lectionnĂ©es, tandis quâun produit dĂ©crit comme « riche en protĂ©ines, prĂȘt en 90 secondes, idĂ©al pour les parents » a plus de chances dâĂȘtre recommandĂ© par lâIA.
Cette Ă©volution modifie aussi le rĂŽle des sites web : ils deviennent non plus des vitrines, mais des bases de donnĂ©es alimentant lâIA. Il ne sâagit plus de sĂ©duire uniquement les visiteurs humains, mais aussi les algorithmes. Les marques ne peuvent pas acheter leur place dans les rĂ©ponses : OpenAI prĂ©cise que les recommandations ne sont pas sponsorisĂ©es.
OpenAI travaille cependant Ă intĂ©grer des flux produits fournis directement par les distributeurs, afin dâactualiser les informations et dâĂ©largir les rĂ©fĂ©rences. Ce changement intervient alors que, selon Adobe Analytics, le trafic en provenance dâIA vers les sites e-commerce britanniques a bondi de 500 % en six mois.
Pour Chris Camacho (Cheil UK), il sâagit dâune mutation profonde : « Câest la plus grande transformation des comportements dâachat depuis le smartphone. »
LA Times, Japanâs rice crisis: Prices soar, supplies dwindle and a minister resigns, 22/05/2025
Le Japon traverse une crise majeure du riz, son aliment de base et un pilier culturel. Depuis lâĂ©tĂ© 2024, les prix ont doublĂ©, atteignant jusquâĂ 35 $ pour 5 kg, tandis que les stocks chutent. Cette situation a conduit Ă la dĂ©mission du ministre de lâAgriculture, Taku Eto, aprĂšs des propos perçus comme dĂ©connectĂ©s du quotidien des Japonais. Il a affirmĂ© nâavoir jamais eu besoin dâacheter de riz, car ses soutiens lui en offrent. En pleine inflation, cette dĂ©claration a provoquĂ© un tollĂ©.
Le nouveau ministre, Shinjiro Koizumi, est chargĂ© de rĂ©tablir la situation, alors que la pĂ©nurie sâaggrave. Ă lâorigine de cette crise : des politiques agricoles de longue date incitant Ă rĂ©duire les surfaces de culture de riz pour maintenir des prix Ă©levĂ©s, combinĂ©es Ă une mauvaise rĂ©colte 2023 (chaleur et ravageurs), une hausse de la consommation liĂ©e Ă lâinflation du blĂ©, et une forte reprise du tourisme et de la restauration.
La chaĂźne dâapprovisionnement est Ă©galement en cause : le systĂšme coopĂ©ratif traditionnel (JA) cohabite avec des canaux alternatifs (vente en ligne, distributeurs privĂ©s), rendant les flux de riz moins lisibles. Le gouvernement a libĂ©rĂ© des stocks dâurgence, mais seuls 10 % ont atteint les supermarchĂ©s, accentuant la colĂšre des consommateurs.
Les capacitĂ©s de transformation (du riz brun en riz blanc) seraient insuffisantes, et certains accusent les grossistes de spĂ©culation. Les mesures gouvernementales sont jugĂ©es trop lentes et peu efficaces. LâĂ©conomiste Kazuhito Yamashita critique une politique de rĂ©duction des surfaces cultivĂ©es contraire Ă la sĂ©curitĂ© alimentaire, qui profiterait avant tout aux intĂ©rĂȘts de JA.
Face Ă la pĂ©nurie, les grandes enseignes sâadaptent. Aeon va commercialiser pour la premiĂšre fois du riz Japonica cultivĂ© aux Ătats-Unis (Calrose) en sachets de 4 kg Ă 20 $, dans 600 magasins. Lâobjectif est dâĂ©viter un dĂ©sintĂ©rĂȘt des consommateurs pour le riz, ce qui pourrait durablement affaiblir la filiĂšre.
Cette crise rĂ©vĂšle enfin une fragilitĂ© structurelle : la population agricole vieillit (69 ans de moyenne) et a chutĂ© de moitiĂ© en 20 ans. Le Japon devra repenser sa stratĂ©gie agricole sâil veut garantir lâaccĂšs Ă son aliment emblĂ©matique.
Financial Times, Tome sweet tome: Londonâs best bookshop bars, 27/05/2025
Ă Londres, les librairies traditionnelles se transforment en vĂ©ritables lieux de vie en intĂ©grant cafĂ©s, bars Ă vin, ateliers dâĂ©criture ou soirĂ©es de rencontres. Lâarticle met en lumiĂšre cette nouvelle tendance oĂč lâexpĂ©rience sociale et culturelle autour du livre devient centrale, portĂ©e par une gĂ©nĂ©ration avide de lien, dâauthenticitĂ© et de littĂ©rature populaire.
Des Ă©tablissements comme BookBar Ă Highbury, Backstory Ă Balham, BĂ rd Books Ă Bow ou Morocco Bound Ă Bermondsey illustrent cette mutation. Ces lieux hybrides mĂȘlent librairie, bar, cafĂ© et espace Ă©vĂ©nementiel, avec des programmations incluant des clubs de lecture, des concerts, des open mics et mĂȘme des soirĂ©es speed-dating littĂ©raires.
La force de ce modĂšle rĂ©side dans sa capacitĂ© Ă capter les publics jeunes, influencĂ©s par BookTok (la communautĂ© littĂ©raire sur TikTok), qui redonne envie de lire et de frĂ©quenter les librairies physiques. Les chiffres sont Ă©loquents : prĂšs de 50 % des jeunes Britanniques de 16 Ă 25 ans dĂ©clarent avoir achetĂ© un livre repĂ©rĂ© sur BookTok, et beaucoup privilĂ©gient lâachat en magasin plutĂŽt quâen ligne.
Chaque lieu développe son identité :
BookBar, fondĂ©e en 2021, met lâaccent sur la littĂ©rature contemporaine, les vins naturels et les Ă©vĂ©nements intimes.
Backstory, imaginée par un ancien journaliste, propose un bar central animé, une programmation engagée, et attire les trentenaires avec des titres tendance.
Bà rd Books se veut un « third place » pour la communauté locale, alliant café, bar à cocktails, littérature indie et poésie.
Morocco Bound, avec sa sélection de titres internationaux et sa cave à biÚres artisanales, fait office de QG créatif pour les jeunes auteurs et musiciens.
Ces librairies nouvelles gĂ©nĂ©rations offrent aussi des abonnements littĂ©raires personnalisĂ©s, des conseils de lecture en live, et des sĂ©lections pointues. Elles sâinscrivent dans un double mouvement : retour au local et rĂ©sistance Ă la standardisation numĂ©rique. Leur succĂšs repose sur une proposition rare : mĂȘler lecture, sociabilitĂ©, gastronomie et culture dans un mĂȘme espace chaleureux.
Ă lâheure de lâhyperconnexion, ces librairies-bar incarnent un refuge pour les lecteurs urbains, et un modĂšle Ă©conomique innovant qui redonne vie aux quartiers tout en soutenant la scĂšne Ă©ditoriale indĂ©pendante.
Wall Street Journal, Soaring Costs Expose a Trans-Atlantic Chocolate Divide, 30/05/2025
Lâarticle met en lumiĂšre la fracture croissante entre lâEurope et les Ătats-Unis face Ă lâexplosion des prix du chocolat, consĂ©quence directe de la hausse du coĂ»t du cacao sur les marchĂ©s mondiaux. Cette situation rĂ©vĂšle des diffĂ©rences culturelles, Ă©conomiques et industrielles profondes entre les deux continents dans la maniĂšre de concevoir, produire et consommer le chocolat.
Le prix du cacao a atteint des niveaux record en 2025, en raison de mauvaises rĂ©coltes en Afrique de lâOuest (notamment en CĂŽte dâIvoire et au Ghana) et dâune spĂ©culation accrue. Les industriels doivent faire des choix : rĂ©duire les volumes, augmenter les prix, reformuler les recettes ou rogner sur la qualitĂ©.
En Europe, oĂč le chocolat est considĂ©rĂ© comme un produit gastronomique et identitaire, les marques privilĂ©gient la qualitĂ© et la transparence. Des acteurs comme Lindt, Valrhona ou Bonnat prĂ©fĂšrent assumer une hausse tarifaire plutĂŽt que de compromettre leurs standards. Ils communiquent sur la provenance du cacao, le pourcentage, le terroir et lâĂ©thique. Les consommateurs europĂ©ens, bien que sensibles au prix, acceptent encore de payer plus cher pour un produit premium ou artisanal.
Ă lâinverse, aux Ătats-Unis, le marchĂ© est dominĂ© par des gĂ©ants comme Hershey ou Mars, dont les produits sont souvent plus sucrĂ©s, moins concentrĂ©s en cacao, et destinĂ©s Ă une consommation de masse. Pour maintenir leurs marges dans un contexte inflationniste, ces marques choisissent parfois dâutiliser des substituts, comme les huiles vĂ©gĂ©tales ou le beurre de cacao partiel, voire rĂ©duisent la taille des portions (shrinkflation). Les reformulations sont souvent invisibles pour le consommateur moyen, mais dĂ©noncĂ©es par certains analystes et dĂ©fenseurs de la qualitĂ©.
Lâarticle souligne aussi le rĂŽle croissant des distributeurs (notamment aux Ătats-Unis), qui imposent des pressions sur les fournisseurs pour contenir les prix. Les marques doivent alors arbitrer entre qualitĂ©, volume et compĂ©titivitĂ©. Cette logique creuse une ligne de fracture entre un chocolat perçu comme un produit culturel et artisanal en Europe, et un produit industriel, standardisĂ© et commodifiĂ© aux Ătats-Unis.
Face Ă cette tension, certains chocolatiers amĂ©ricains indĂ©pendants tentent de se rapprocher du modĂšle europĂ©en. Mais ils restent confrontĂ©s Ă une culture de la consommation diffĂ©rente et Ă un public encore peu habituĂ© aux critĂšres de qualitĂ© âbean-to-barâ. La crise actuelle pourrait bien redĂ©finir les contours du marchĂ© mondial du chocolat pour les annĂ©es Ă venir.
Financial Times, Robert F Kennedy Jrâs battle with Big Food, 26/05/2025
Depuis sa nomination au poste de secrĂ©taire Ă la santĂ© des Ătats-Unis, Robert F. Kennedy Jr, figure controversĂ©e et ancien avocat environnemental, mĂšne une offensive spectaculaire contre lâindustrie agroalimentaire amĂ©ricaine. Son objectif : rĂ©former en profondeur les pratiques alimentaires responsables, selon lui, de lâexplosion des maladies chroniques (obĂ©sitĂ©, diabĂšte de type 2, troubles de lâattention).
Convaincu que les gĂ©ants de lâagroalimentaire « font de lâargent en maintenant les AmĂ©ricains malades », Kennedy a lancĂ© une sĂ©rie dâinitiatives Ă travers la commission Make America Healthy Again. Son plan comprend lâinterdiction progressive des colorants alimentaires synthĂ©tiques (comme le Red 3), la suppression du sucre ajoutĂ© des recommandations nutritionnelles, et la rĂ©forme du systĂšme dâautorisation des ingrĂ©dients.
Son approche, radicale, suscite lâenthousiasme dâune partie des experts en santĂ© publique. Marion Nestle, Ă©minente spĂ©cialiste en nutrition, salue son courage sur les enjeux de maladies chroniques, tout en regrettant ses positions anti-scientifiques passĂ©es sur les vaccins. La tension est palpable entre sa posture populiste anti-systĂšme et la rigueur attendue dâun haut fonctionnaire.
Lâarticle montre aussi comment Kennedy mobilise des figures influentes des rĂ©seaux sociaux, comme la blogueuse Food Babe ou lâancienne mĂ©decin Casey Means, pour appuyer ses positions. Le mouvement « Maha » (Make America Healthy Again) sâimpose comme une force politique hybride, mĂȘlant bien-ĂȘtre, critique du Big Pharma et nationalisme alimentaire.
Lâindustrie agroalimentaire, dâabord silencieuse, organise dĂ©sormais la riposte. Les entreprises comme PepsiCo commencent Ă retirer certains additifs (colorants) de leurs produits, mais sâinquiĂštent de la volontĂ© de restreindre lâusage des aides alimentaires (programme SNAP) Ă lâachat de produits jugĂ©s sains. Plusieurs Ătats conservateurs soutiennent dĂ©sormais ces restrictions, illustrant un glissement idĂ©ologique inĂ©dit, oĂč des rĂ©formes autrefois portĂ©es par la gauche sont aujourdâhui dĂ©fendues dans les Ătats rĂ©publicains.
Kennedy affirme que son objectif est un changement structurel, et que son administration ne nĂ©gociera pas avec les lobbys. Dâici 2026, il promet une interdiction totale des colorants artificiels. Cette croisade soulĂšve une question centrale : la santĂ© publique peut-elle ĂȘtre rĂ©formĂ©e par une alliance entre mĂ©decine alternative, activisme digital et populisme politique ?
Câest tout pour aujourdâhui.
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O. Frey