đŸđđ Eat's business đđ·đ§ 2025-07
Bonjour Ă toutes et Ă tous, Eat's Business est une newsletter dans laquelle vous trouverez une revue de presse de quelques articles sur le monde de lâalimentaire qui mâont semblĂ© intĂ©ressants dans la semaine prĂ©cĂ©dente.
Pour ceux qui veulent la formule ristretto, les 3 articles que je vous conseille de lire en priorité cette semaine sont :
Libération, Nitrites : la farce cachée de la saucisse, 15/02/2025
Le Parisien, Sushis Yves Saint Laurent, café Dior⊠à Paris, les marques de luxe se diversifient pour attirer toujours plus, 20/02/2025
Wall Street Journal, âGut Popâ Is Injecting New Fizz Into the Beverage Aisle, 18/02/2025
Bonne lecture et bonne semaine Ă toutes et Ă tous!
Eatâs Business sera en mode vacances pour les 2 prochaines semaines.
Pour celles et ceux dâentre vous qui ont plus de temps pour la formule lungo :
Le Monde, Aux Etats-Unis, pays de la malbouffe, un projet dâĂ©tiquette nutritionnelle sur les emballages, 17/02/2025
Face Ă une crise de lâobĂ©sitĂ© qui touche prĂšs de trois adultes sur quatre aux Ătats-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) veut imposer un nouvel Ă©tiquetage nutritionnel sur les emballages des produits alimentaires transformĂ©s. Cette mesure vise Ă alerter de maniĂšre simple les consommateurs sur les niveaux de graisses saturĂ©es, de sodium et de sucres ajoutĂ©s. Contrairement aux informations dĂ©taillĂ©es figurant dĂ©jĂ au dos des emballages, ce nouveau label apparaĂźtrait en face avant, avec un code couleur indiquant si les niveaux de ces nutriments sont faibles, moyens ou Ă©levĂ©s.
Lâobjectif est de lutter contre les maladies chroniques liĂ©es Ă une alimentation dĂ©sĂ©quilibrĂ©e, comme le diabĂšte, les maladies cardiovasculaires et certains cancers, qui coĂ»tent chaque annĂ©e plus de 4 500 milliards de dollars au systĂšme de santĂ© amĂ©ricain. InspirĂ©e de modĂšles dĂ©jĂ adoptĂ©s en AmĂ©rique latine, cette initiative pourrait inciter les industriels Ă reformuler leurs produits, comme cela a Ă©tĂ© observĂ© au Chili, oĂč un Ă©tiquetage similaire a entraĂźnĂ© une rĂ©duction de 25 % des achats dâaliments trop gras ou sucrĂ©s.
Cependant, la mesure suscite dĂ©jĂ des critiques. Certains experts, bien que favorables Ă un Ă©tiquetage obligatoire, estiment que le modĂšle choisi par la FDA est trop complexe et risque dâembrouiller le consommateur, contrairement Ă des systĂšmes plus simples comme le Nutri-Score europĂ©en. Lâindustrie agroalimentaire, de son cĂŽtĂ©, fustige une "mĂ©thodologie opaque" et dĂ©fend son propre programme dâĂ©tiquetage volontaire, Facts Up Front, jugĂ© plus pertinent.
Lâavenir de cette rĂ©glementation reste incertain avec lâentrĂ©e en fonction de la nouvelle administration Trump, dont le ministre de la SantĂ©, Robert F. Kennedy Jr., est un fervent opposant aux aliments ultra-transformĂ©s, mais aussi un critique des rĂ©gulations excessives. Si certains experts espĂšrent que cette initiative sera maintenue au nom de la transparence pour les consommateurs, dâautres redoutent quâelle soit rapidement enterrĂ©e sous la pression des lobbies agroalimentaires.
LâUsine Nouvelle, Face Ă l'explosion du prix du cacao, les industriels s'adaptent, entre difficultĂ©s de trĂ©sorerie et reformulations, 21/02/2025
Face à la flambée du prix du cacao, les industriels du chocolat adoptent différentes stratégies pour préserver leurs marges et maintenir leur compétitivité.
Les fabricants de tablettes, comme Lindt ou Grain de Sail, nâont dâautre choix que de rĂ©duire discrĂštement les grammages de leurs produits sans en modifier la recette. Certaines tablettes, auparavant de 150 g, passent ainsi Ă 147 g. Dâautres marques misent sur des hausses de prix progressives pour amortir lâaugmentation du coĂ»t des matiĂšres premiĂšres.
Les grands groupes agroalimentaires, comme NestlĂ© et Mondelez, qui intĂšgrent le chocolat dans des produits transformĂ©s, adoptent une approche plus flexible. Ils modifient leurs formulations en augmentant la part dâingrĂ©dients moins coĂ»teux comme le sucre ou les matiĂšres grasses, rĂ©duisant ainsi la proportion de cacao sans altĂ©rer lâapparence ni la texture du produit.
Certains industriels se tournent vers des solutions technologiques alternatives. Le dĂ©veloppement de la "cacao tech", qui vise Ă produire du cacao en laboratoire ou Ă utiliser des substituts vĂ©gĂ©taux, attire de plus en plus dâinvestissements. NestlĂ© collabore avec Barry Callebaut pour convertir 11 000 hectares Ă lâagroforesterie en Afrique de lâOuest, tandis que dâautres explorent des sources dâapprovisionnement alternatives en AmĂ©rique du Sud, notamment au BrĂ©sil, oĂč la production devrait fortement augmenter dans les prochaines annĂ©es.
Les contraintes dâapprovisionnement incitent Ă©galement les entreprises Ă changer leurs modes dâachat. Alors quâelles sĂ©curisaient auparavant leurs volumes par des contrats long terme, beaucoup doivent dĂ©sormais payer des acomptes plus Ă©levĂ©s (jusquâĂ 70 % du prix de la livraison) pour garantir leur accĂšs Ă la matiĂšre premiĂšre. Cette pression financiĂšre fragilise particuliĂšrement les PME et les chocolatiers bio, certains producteurs de cacao abandonnant mĂȘme les certifications biologiques, jugĂ©es trop contraignantes face Ă des prix record.
Dans ce contexte tendu, les industriels doivent trouver un Ă©quilibre entre lâaugmentation des prix, la reformulation des produits et lâinnovation, tout en Ă©vitant de faire fuir les consommateurs. La crise actuelle accĂ©lĂšre ainsi la transformation du secteur, avec un repositionnement stratĂ©gique qui pourrait durablement modifier la composition et lâoffre des produits chocolatĂ©s.
Le Figaro, Le roquefort, un siÚcle de fierté française, 15/02/2025
Le roquefort fĂȘte en 2025 le centenaire de son appellation dâorigine. Premier produit alimentaire Ă avoir obtenu une Appellation dâOrigine ProtĂ©gĂ©e (AOP) en 1925, il reste une fiertĂ© nationale et un symbole du terroir français. Sa fabrication repose sur un cahier des charges strict, garantissant son authenticitĂ© et son lien exclusif avec le village de Roquefort-sur-Soulzon, en Aveyron. Pourtant, malgrĂ© son prestige et son rayonnement international, avec 28 % de sa production exportĂ©e dans 120 pays, sa consommation est en dĂ©clin, enregistrant une baisse de 3 Ă 4 % par an depuis 2022.
Cette baisse sâexplique par plusieurs facteurs. Dâune part, les habitudes alimentaires Ă©voluent, avec une rĂ©duction de la consommation de fromages en gĂ©nĂ©ral, accentuĂ©e par les prĂ©occupations sanitaires et nutritionnelles. Dâautre part, les jeunes gĂ©nĂ©rations connaissent moins le roquefort et peuvent le percevoir comme un produit trop fort ou traditionnel. Face Ă ces dĂ©fis, les acteurs de la filiĂšre cherchent Ă redynamiser lâimage du roquefort et Ă diversifier ses usages.
Pour marquer son centenaire, lâAOP Roquefort mise sur une grande campagne de communication, avec pour slogan "Pour toujours au goĂ»t du jour". Elle vise Ă moderniser lâimage du fromage et Ă le rendre plus attractif, notamment en mettant en avant ses atouts gastronomiques et en encourageant de nouvelles façons de le consommer, au-delĂ du traditionnel plateau de fromages. Plusieurs chefs Ă©toilĂ©s, dont SĂ©bastien Bras et NoĂ©mie Honiat, participent Ă cette opĂ©ration en proposant des recettes intĂ©grant le roquefort de maniĂšre innovante.
Le point dâorgue des festivitĂ©s aura lieu les 7 et 8 juin 2025 Ă Roquefort-sur-Soulzon. Un grand Ă©vĂ©nement rĂ©unira producteurs, affineurs et gastronomes autour de dĂ©gustations, visites de caves et dĂ©monstrations culinaires. Lâobjectif est de sensibiliser le public Ă la richesse de ce produit et de susciter un regain dâintĂ©rĂȘt, notamment auprĂšs des jeunes consommateurs. MalgrĂ© ces efforts, lâenjeu reste de taille : rĂ©ussir Ă inverser la tendance Ă la baisse et garantir un avenir prospĂšre au roquefort. Pour cela, les producteurs comptent aussi sur des partenariats avec la grande distribution et la restauration, afin de promouvoir ce fromage comme un produit dâexception, mais accessible et adaptĂ© aux nouvelles tendances culinaires.
LibĂ©ration, Mort de Francesco Rivella, lâinventeur du Nutella : une tartine pour la route, 18/02/2025
Francesco Rivella, ce nom ne vous pas grand grand chose. Et pourtant, ce chimiste italien, dĂ©cĂ©dĂ© Ă lâĂąge de 97 ans le 14 fĂ©vrier dernier a jouĂ© un rĂŽle clĂ© dans la mise au point du Nutella. DiplĂŽmĂ© en chimie de lâuniversitĂ© de Turin, Francesco Rivella a rejoint lâentreprise Ferrero en 1952, alors que la sociĂ©tĂ© nâĂ©tait encore quâune modeste confiserie familiale Ă Alba, dans le PiĂ©mont. ChargĂ© du dĂ©veloppement de nouveaux produits, il participe Ă la crĂ©ation de la Supercrema, la premiĂšre version du Nutella, avant dâoptimiser sa recette et de lui donner son nom dĂ©finitif. Ce dernier, formĂ© du mot anglais nut (noisette) et du suffixe italien -ella, est aujourdâhui mondialement reconnu.
Le Nutella sâest rapidement imposĂ© comme lâun des produits phares de lâindustrie agroalimentaire, devenant un symbole du goĂ»t sucrĂ© et de lâenfance pour des millions de consommateurs. Cependant, son succĂšs ne sâest pas fait sans controverses. La pĂąte Ă tartiner est rĂ©guliĂšrement critiquĂ©e pour sa forte teneur en sucre et en huile de palme, ainsi que pour son impact environnemental. MalgrĂ© cela, elle reste un incontournable des foyers du monde entier et lâun des produits alimentaires les plus emblĂ©matiques du XXe siĂšcle.
Au-delĂ du Nutella, Francesco Rivella a Ă©galement contribuĂ© Ă dâautres succĂšs de la marque Ferrero, comme les Ferrero Rocher et les Mon ChĂ©ri, qui ont connu un rayonnement international. Proche de lâĂ©crivain Primo Levi, il Ă©tait respectĂ© pour sa discrĂ©tion et son engagement envers lâinnovation. Son influence sur lâagroalimentaire dĂ©passe largement son rĂŽle chez Ferrero, puisquâil a contribuĂ© Ă transformer une recette artisanale en un produit de consommation de masse.
Son dĂ©cĂšs marque la fin dâune Ă©poque pour Ferrero et pour lâindustrie agroalimentaire. Francesco Rivella laisse derriĂšre lui un hĂ©ritage indĂ©lĂ©bile, illustrant lâimportance de la recherche et de lâinnovation dans la crĂ©ation de produits iconiques.
Libération, Nitrites : la farce cachée de la saucisse, 15/02/2025
Les nitrites sont de plus en plus dĂ©criĂ©s. ClassĂ©s comme potentiellement cancĂ©rogĂšnes par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), ils sont omniprĂ©sents dans de nombreux produits industriels, notamment les saucisses et autres charcuteries transformĂ©es. Pourtant, malgrĂ© les alertes sanitaires et les alternatives disponibles, lâindustrie agroalimentaire peine Ă sâen passer.
Dans une enquĂȘte approfondie, LibĂ©ration explore la rĂ©alitĂ© des nitrites dans nos assiettes. Lâarticle met en lumiĂšre leur rĂŽle dans la formation de composĂ©s chimiques nocifs pour la santĂ©, notamment les nitrosamines, dont la consommation excessive est liĂ©e Ă des risques accrus de cancer colorectal. En 2022, lâAgence nationale de sĂ©curitĂ© sanitaire de l'alimentation (Anses) a confirmĂ© ces dangers, en sâappuyant sur plusieurs Ă©tudes scientifiques.
Face à ces constats, certaines enseignes commencent à proposer des alternatives "sans nitrites". Carrefour, par exemple, a récemment annoncé vouloir développer une large gamme de charcuteries exemptes de cet additif. Cependant, ces produits restent minoritaires et souvent plus chers, ce qui limite leur accessibilité pour les consommateurs les plus sensibles aux questions budgétaires.
Lâindustrie charcutiĂšre, reprĂ©sentĂ©e notamment par la FĂ©dĂ©ration des entreprises de charcuterie traiteur (FICT), affirme quâil est difficile de se passer complĂštement des nitrites sans impact sur la qualitĂ© et la sĂ©curitĂ© des produits. Selon ses porte-paroles, produire de la charcuterie sans nitrites nĂ©cessiterait des investissements consĂ©quents et une adaptation des processus de fabrication, ce qui entraĂźnerait inĂ©vitablement une hausse des coĂ»ts de production.
Des experts, comme le journaliste et auteur Guillaume Coudray, dĂ©noncent cette position et affirment que de nombreuses entreprises ont dĂ©jĂ prouvĂ© quâil est possible de fabriquer des produits sans nitrites sans nuire Ă leur qualitĂ©. Certains artisans charcutiers, ainsi que des marques spĂ©cialisĂ©es, proposent dâores et dĂ©jĂ des saucisses et jambons naturels qui rencontrent un certain succĂšs auprĂšs des consommateurs avertis.
Le dĂ©bat autour des nitrites soulĂšve Ă©galement la question de la responsabilitĂ© des pouvoirs publics. Faut-il une interdiction pure et simple, ou privilĂ©gier une rĂ©duction progressive de leur utilisation ? Si la prise de conscience grandit, la transition vers une charcuterie plus saine reste un dĂ©fi, entre les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques des industriels et les prĂ©occupations croissantes des consommateurs pour leur santĂ©.
Les Ăchos, Le plan de Bruxelles pour l'agriculture, 20/02/2025
Face aux tensions croissantes dans le secteur agricole européen, la Commission européenne a présenté un plan stratégique visant à moderniser et simplifier la Politique Agricole Commune (PAC), tout en renforçant la protection des agriculteurs face à la concurrence internationale. Ce programme, qui couvre les quinze prochaines années, répond aux nombreuses revendications des exploitants, confrontés à une réglementation complexe et à des pressions économiques exacerbées par les exigences environnementales et les accords commerciaux internationaux.
Parmi les mesures phares de ce plan, Bruxelles propose de bloquer lâimportation de produits alimentaires contenant des pesticides interdits sur le territoire de lâUnion europĂ©enne. Cette dĂ©cision, largement soutenue par la France, vise Ă garantir une concurrence plus Ă©quitable pour les agriculteurs europĂ©ens, qui doivent respecter des normes sanitaires et environnementales strictes. LâEurope veut ainsi Ă©viter que des produits traitĂ©s avec des substances interdites puissent entrer sur son marchĂ©, une pratique jugĂ©e dĂ©loyale par de nombreux producteurs. Cette mesure pourrait notamment impacter les importations de thĂ© et de cafĂ© en provenance de Chine et dâInde, ainsi que les fruits et lĂ©gumes du BrĂ©sil.
En parallĂšle, la Commission europĂ©enne prĂ©voit une rĂ©forme en profondeur de la PAC post-2027. Lâobjectif est de rendre cette politique plus simple et mieux ciblĂ©e, en concentrant les aides sur les exploitations les plus fragiles, les jeunes agriculteurs et les zones confrontĂ©es Ă des contraintes naturelles. La PAC pourrait Ă©galement inclure un soutien renforcĂ© aux pratiques agricoles durables, tout en limitant les obligations administratives jugĂ©es trop contraignantes par les agriculteurs.
Le plan met Ă©galement lâaccent sur la lutte contre les pratiques commerciales dĂ©loyales, notamment les ventes Ă perte imposĂ©es aux producteurs. Une rĂ©vision des rĂšgles en la matiĂšre est envisagĂ©e afin de mieux protĂ©ger les agriculteurs face aux grandes surfaces et aux distributeurs. Toutefois, lâun des principaux dĂ©fis reste le financement de ces rĂ©formes. La PAC reprĂ©sente actuellement 30 % du budget de lâUE, mais certains Ătats membres militent pour une rĂ©duction de ces dĂ©penses. Bruxelles devra donc trouver un Ă©quilibre entre soutien au secteur agricole et contraintes budgĂ©taires.
Le Parisien, Sushis Yves Saint Laurent, café Dior⊠à Paris, les marques de luxe se diversifient pour attirer toujours plus, 20/02/2025
Le luxe ne se limite plus aux vĂȘtements et aux accessoires : il devient une expĂ©rience totale, englobant la gastronomie, lâart et le lifestyle. Lâouverture par Yves Saint Laurent dâun restaurant de sushis Ă Paris, au sein de sa boutique rĂ©novĂ©e Saint Laurent Rive Droite, illustre cette tendance croissante oĂč les grandes maisons de mode investissent la restauration pour renforcer leur image et fidĂ©liser leur clientĂšle.
Ce phĂ©nomĂšne sâaccĂ©lĂšre depuis plusieurs annĂ©es. Dior, Louis Vuitton, HermĂšs, Ralph Lauren et Chanel ont tous intĂ©grĂ© des cafĂ©s ou restaurants Ă leurs flagships parisiens. Lâobjectif nâest pas tant de gĂ©nĂ©rer du chiffre dâaffaires direct que de proposer une expĂ©rience immersive, oĂč le consommateur sâimprĂšgne des valeurs et de lâunivers de la marque. Selon Swannie Teboul, spĂ©cialiste du recrutement dans le luxe, cette Ă©volution marque une rupture : "Ce nâest plus une simple addition de services, mais une rĂ©invention du luxe."
Les maisons utilisent la gastronomie comme un levier marketing puissant. Chez Louis Vuitton, le cafĂ© et la chocolaterie ouverte en 2022, signĂ©e par le chef pĂątissier Maxime FrĂ©dĂ©ric, proposent des desserts Ă 18 euros en moyenne, une maniĂšre dâassocier le prestige de la marque Ă une expĂ©rience gustative exclusive. Dior, avec son restaurant Monsieur Dior, et HermĂšs, avec son cafĂ©-librairie ChaĂźne dâEncre, adoptent la mĂȘme stratĂ©gie : faire vivre la marque autrement quâĂ travers le produit.
Cette dĂ©marche offre aussi une porte dâentrĂ©e accessible pour un public plus large. Un sac ou un vĂȘtement de luxe restent hors de portĂ©e de nombreuses personnes, mais un cafĂ© ou une pĂątisserie siglĂ©e offrent un avant-goĂ»t de lâunivers de la marque, rendant le rĂȘve plus tangible. Selon Benjamin Legourd, cofondateur dâAtelier Particulier, ces lieux sont avant tout des outils de storytelling et de fidĂ©lisation, destinĂ©s Ă ancrer la marque dans le quotidien des consommateurs.
Enfin, cette tendance dĂ©passe le seul secteur du luxe. Zara, gĂ©ant du prĂȘt-Ă -porter, a rĂ©cemment ouvert son propre CafĂ© Zara Ă Madrid, illustrant que cette stratĂ©gie immersive devient un modĂšle incontournable pour les enseignes souhaitant enrichir leur relation client.
Les Ăchos, Le caviar d'Aquitaine dĂ©croche son IGP aprĂšs douze annĂ©es d'efforts, 19/02/2025
AprĂšs douze annĂ©es de dĂ©marches administratives et dâefforts de structuration de la filiĂšre, le caviar dâAquitaine a enfin obtenu son Indication GĂ©ographique ProtĂ©gĂ©e (IGP). Cette reconnaissance officielle par lâUnion europĂ©enne permet aux producteurs du Sud-Ouest de mieux valoriser leur savoir-faire et dâapporter une garantie dâorigine et de qualitĂ© aux consommateurs.
Le cahier des charges de lâIGP impose que lâensemble du cycle de production, de la naissance des alevins jusquâau conditionnement des Ćufs dâesturgeon, se dĂ©roule dans la zone gĂ©ographique concernĂ©e. De plus, les Ă©levages doivent respecter des pratiques rigoureuses, notamment lâinterdiction dâutiliser des antibiotiques et des OGM. Cette certification concerne exclusivement lâesturgeon Baeri, espĂšce historiquement Ă©levĂ©e en France, et ne sâĂ©tend pas encore Ă lâOsciĂštre, introduit plus rĂ©cemment dans les Ă©levages hexagonaux.
Cette distinction arrive dans un contexte de forte concurrence internationale, en particulier face Ă la domination du caviar chinois. La production française, estimĂ©e Ă environ 50 tonnes par an, est largement Ă©clipsĂ©e par les 220 tonnes de caviar produites en Chine, dont une part croissante est exportĂ©e vers lâEurope. Cette compĂ©tition met les producteurs français sous pression, dâautant plus que les Ătats-Unis imposent des droits de douane Ă©levĂ©s sur les importations chinoises, laissant ainsi le marchĂ© europĂ©en comme dĂ©bouchĂ© principal pour ces produits.
Pour les producteurs aquitains, lâIGP constitue un atout majeur pour se dĂ©marquer sur un marchĂ© de plus en plus concurrentiel. Laurent Dulau, prĂ©sident de lâOrganisme de DĂ©fense et de Gestion du Caviar dâAquitaine et directeur gĂ©nĂ©ral du groupe Kaviar, souligne que cette certification permettra de mieux valoriser la production locale, tout en rassurant les consommateurs sur lâauthenticitĂ© du produit. Il espĂšre Ă©galement que cette reconnaissance attirera une clientĂšle plus exigeante, notamment dans la haute gastronomie et auprĂšs des chefs Ă©toilĂ©s, qui privilĂ©gient les produits locaux et de qualitĂ©.
Lâofficialisation de lâIGP sera cĂ©lĂ©brĂ©e le 27 fĂ©vrier au Salon de lâAgriculture, oĂč les producteurs prĂ©senteront leur dĂ©marche et les atouts de leur caviar. Ils espĂšrent ainsi sensibiliser davantage le grand public Ă lâimportance de soutenir une filiĂšre qui se veut Ă la fois respectueuse des Ă©cosystĂšmes et garante dâun produit dâexception.
Les Ăchos, Pourquoi la fin du broyage des poussins menace la France d'une pĂ©nurie d'oeufs, 20/02/2025
Ă quelques jours du Salon de lâAgriculture, une crise menace lâapprovisionnement en Ćufs en France. La ConfĂ©dĂ©ration française de lâaviculture (CFA) alerte sur un possible arrĂȘt des livraisons vers Carrefour et E.Leclerc, faute dâaccord sur le financement de lâovosexage, une technique permettant dâidentifier les embryons mĂąles avant lâĂ©closion. Cette mĂ©thode, adoptĂ©e en 2022 pour remplacer le broyage des poussins mĂąles, coĂ»te 50 millions dâeuros par an et repose sur une contribution volontaire obligatoire (CVO), actuellement financĂ©e par la grande distribution Ă hauteur de 58 centimes pour 100 Ćufs.
Cet accord arrive Ă Ă©chĂ©ance le 1á”Êł mars 2025 et devait ĂȘtre renĂ©gociĂ© pour inclure les grossistes. Or, la grande distribution a annulĂ© sa participation aux discussions, provoquant la colĂšre des producteurs, qui dĂ©noncent une volontĂ© de leur faire porter seuls le surcoĂ»t. Le Syndicat national des industriels et professionnels de l'Ćuf (SNIPO) souligne que cette charge reprĂ©senterait un euro par poussin, soit un coĂ»t insoutenable pour de nombreuses exploitations.
Une solution proposĂ©e par le gouvernement prĂ©voit dâĂ©tendre la CVO Ă tous les acheteurs dâĆufs, ce qui permettrait de rĂ©duire la contribution des distributeurs Ă 39 centimes pour 100 Ćufs. Bien que cette option soit sur la table, aucun accord nâa encore Ă©tĂ© trouvĂ©, et la menace de pĂ©nurie plane.
Les aviculteurs disposent dâun levier important : lâexportation. Les Ătats-Unis, frappĂ©s par une Ă©pidĂ©mie dâinfluenza aviaire ayant entraĂźnĂ© lâabattage de 23 millions de volailles en janvier 2025, connaissent une flambĂ©e des prix des Ćufs (+15,2 % en un mois). Si les producteurs français privilĂ©gient ces marchĂ©s plus rĂ©munĂ©rateurs, lâoffre nationale pourrait diminuer, entraĂźnant une hausse des prix pour les consommateurs.
Pour lâinstant, la France est largement autosuffisante en Ćufs (94 % pour les Ćufs coquilles et 106 % pour les ovoproduits), et les prix restent stables grĂące Ă la vaccination contre la grippe aviaire. Cependant, si aucun compromis nâest trouvĂ© avant le 1á”Êł mars, la situation pourrait rapidement se dĂ©tĂ©riorer et affecter lâapprovisionnement des grandes surfaces. Lâissue du conflit dĂ©pend dĂ©sormais des nĂ©gociations entre Ă©leveurs, distributeurs et gouvernement.
LâHĂŽtellerie Restauration, Un couple cartonne sur les rĂ©seaux avec ses visites filmĂ©es des pires restaurants et hĂŽtels, 20/02/2025
Depuis quelques mois, un couple parisien anonyme fait sensation sur les réseaux sociaux en documentant leurs expériences dans les pires restaurants et hÎtels, sélectionnés à partir des avis les plus négatifs sur Google. Leur compte Instagram et TikTok, intitulé "On ne reviendra pas", connaßt un succÚs fulgurant, avec des vidéos cumulant parfois plusieurs millions de vues. Leur concept ? Tester ces établissements décriés et vérifier si les critiques en ligne sont fondées ou exagérées.
Lâaventure a dĂ©butĂ© dans un restaurant asiatique du quartier de la gare Saint-Lazare, Ă Paris. Face Ă une expĂ©rience catastrophique, ils ont dĂ©cidĂ© de la filmer et de la partager avec leurs proches, qui ont rapidement Ă©tĂ© sĂ©duits par lâoriginalitĂ© du concept. EncouragĂ©s par lâengouement suscitĂ©, ils ont Ă©largi leur champ dâaction et se sont mis Ă traquer les pires Ă©tablissements, non seulement en rĂ©gion parisienne, mais aussi dans dâautres villes comme Lille et mĂȘme Ă lâĂ©tranger.
Leur dĂ©marche se veut Ă la fois critique et humoristique, oscillant entre constat accablant et surprise positive. Certains Ă©tablissements confirment leur rĂ©putation dĂ©plorable, avec des services dĂ©faillants, des plats immangeables ou des conditions dâhygiĂšne douteuses. Mais dâautres, au contraire, sâavĂšrent bien meilleurs que ce que les avis en ligne laissaient supposer. Câest ainsi quâune pizzeria de Pontoise et une enseigne de la place de la Bastille, Ă Paris, ont obtenu une rĂ©habilitation inattendue grĂące Ă leur verdict plus nuancĂ©.
Le couple se distingue des critiques gastronomiques traditionnels par son ton sincÚre et spontané. Ils se filment en caméra cachée, mais à visage découvert, et floutent les noms des établissements pour éviter tout acharnement injustifié. Cette approche leur permet de questionner la pertinence des avis en ligne, souvent subjectifs et influencés par des expériences individuelles biaisées.
Avec plus de 50 000 abonnĂ©s en quelques mois, leur audience ne cesse de croĂźtre, attirant mĂȘme lâattention des mĂ©dias et des professionnels de la restauration. Certains restaurateurs voient en eux une menace, tandis que dâautres apprĂ©cient leur objectivitĂ© et considĂšrent leur passage comme une opportunitĂ© de sâamĂ©liorer.
DĂ©sormais, le duo envisage dâĂ©largir son concept en explorant dâautres destinations Ă lâinternational. Leur dernier voyage au Canada marque une premiĂšre incursion hors dâEurope, confirmant que le format sĂ©duit bien au-delĂ des frontiĂšres françaises.
Food & Wine, Scientists Found a Surprisingly Simple Way to Cut Mercury Content in Canned Tuna by 35%, 19/02/2025
Des chercheurs de lâUniversitĂ© de technologie de Chalmers, en SuĂšde, ont mis au point une mĂ©thode permettant de rĂ©duire jusquâĂ 35 % la teneur en mercure du thon en conserve. Ce contaminant toxique, prĂ©sent dans les poissons prĂ©dateurs comme le thon, constitue un risque pour la santĂ©, notamment pour les femmes enceintes, en raison de son impact sur le dĂ©veloppement neurologique du fĆtus.
PlutĂŽt que de recommander une baisse de la consommation, les chercheurs ont dĂ©veloppĂ© une solution technologique simple. Leur approche repose sur un conditionnement actif, oĂč le thon est conservĂ© dans une solution aqueuse contenant 1,2 % de cystĂ©ine, un acide aminĂ© qui attire et Ă©limine le mercure. Lors des essais, la rĂ©duction maximale de mercure (35 %) a Ă©tĂ© observĂ©e sur du thon hachĂ© en conserve, en raison de sa plus grande surface de contact avec la solution.
Lâun des grands atouts de cette mĂ©thode est quâelle ne nĂ©cessite aucun changement dans le processus industriel. Le mercure extrait est absorbĂ© par des matĂ©riaux adsorbants, comme la silice thiolĂ©e et des polymĂšres thiolĂ©s, qui pourraient ĂȘtre intĂ©grĂ©s sous forme de sachets placĂ©s directement dans les boĂźtes de conserve. Les consommateurs pourraient alors simplement jeter la solution aprĂšs ouverture, comme ils le font avec lâhuile ou lâeau de certains thons en boĂźte.
Cette innovation pourrait reprĂ©senter une avancĂ©e majeure pour la sĂ©curitĂ© alimentaire, en complĂ©ment des efforts visant Ă rĂ©duire la pollution au mercure. En rendant le thon en conserve plus sĂ»r, cette technologie permettrait aux consommateurs de rĂ©duire leur exposition au mercure sans modifier leurs habitudes alimentaires. Elle pourrait Ă©galement ouvrir la voie Ă dâautres emballages actifs pour amĂ©liorer la qualitĂ© des produits de la mer.
Lâindustrie agroalimentaire pourrait adopter cette innovation pour rĂ©pondre aux prĂ©occupations sanitaires croissantes des consommateurs, tout en maintenant une production efficace et inchangĂ©e. Cette solution offre ainsi une alternative prometteuse aux recommandations actuelles de limitation de la consommation de thon.
Slate, The Class War Comes for Condiments, 09/02/2025
Les condiments, autrefois simples accompagnements, sont devenus un enjeu de distinction entre tradition populaire et innovation gastronomique. Lâarticle de Slate explore ce phĂ©nomĂšne Ă travers le succĂšs et la controverse entourant les nouvelles sauces artisanales, souvent jugĂ©es trop chĂšres et Ă©litistes.
Le point de dĂ©part est le lancement dâAyoh!, une mayonnaise haut de gamme créée par Molly Baz. Vendue 10 dollars le tube de 35cl, elle propose des saveurs plus complexes que les marques traditionnelles, mais son prix suscite de vives rĂ©actions. Sur Reddit, certains consommateurs la qualifient de âbonkers expensiveâ (follement chĂšre), tandis que dâautres saluent sa qualitĂ© sans vouloir en faire un achat rĂ©gulier.
Cette critique des condiments artisanaux ne sâarrĂȘte pas Ă la mayonnaise. Le comĂ©dien Paul Scheer sâen est rĂ©cemment pris au ketchup âfait maisonâ, estimant que les versions sophistiquĂ©es servies en restaurant sont inutiles. Pour lui et beaucoup dâAmĂ©ricains, le ketchup est un produit industriel par excellence, et Heinz en est lâincarnation parfaite.
Lâarticle rappelle que cette guerre des condiments nâest pas nouvelle. Dans les annĂ©es 1990, Grey Poupon, une moutarde française introduite aux Ătats-Unis, est devenue un symbole de luxe grĂące Ă une publicitĂ© mettant en scĂšne un millionnaire dĂ©gustant son steak dans une Rolls-Royce. Ce type de marketing a contribuĂ© Ă associer certains condiments Ă un statut social privilĂ©giĂ©, une tendance qui se poursuit avec lâessor des sauces artisanales.
Cependant, lâauteur reconnaĂźt que certaines alternatives ont leur place. Il cite le ketchup Ă la betterave du chef Jesse Griffiths, Ă©laborĂ© pour rĂ©pondre Ă des exigences de production locale au Texas. Bien que diffĂ©rent du ketchup industriel, il sâinscrit dans une approche gastronomique cohĂ©rente.
Lâauteur conclut que les condiments artisanaux ne cherchent pas Ă remplacer les classiques mais Ă enrichir lâoffre existante. Heinz et Hellmannâs resteront des rĂ©fĂ©rences incontournables, mais lâinnovation culinaire a sa place. AprĂšs tout, le ketchup lui-mĂȘme a Ă©voluĂ© au fil du temps, pourquoi refuser lâĂ©mergence de nouvelles versions ?
Wall Street Journal, âGut Popâ Is Injecting New Fizz Into the Beverage Aisle, 18/02/2025
Avec la baisse des ventes de sodas traditionnels, Coca-Cola et PepsiCo se lancent dans le marchĂ© en pleine expansion des sodas prĂ©biotiques, dominĂ© jusquâici par les start-ups Olipop et Poppi. Ces boissons, censĂ©es amĂ©liorer la digestion grĂące Ă des fibres prĂ©biotiques, sĂ©duisent les consommateurs en quĂȘte dâalternatives plus saines.
Les ventes combinĂ©es dâOlipop et Poppi ont atteint 817 millions de dollars aux Ătats-Unis sur lâannĂ©e Ă©coulĂ©e, et Coca-Cola estime que ce marchĂ© pourrait dĂ©passer 2 milliards de dollars dâici 2029. Pour sâimposer, Coca-Cola lancera ce mois-ci Simply Pop, une gamme de sodas contenant 25 Ă 30 % de jus, six grammes de fibres prĂ©biotiques, ainsi que de la vitamine C et du zinc. Pepsi prĂ©pare aussi une version qui arrivera au printemps.
Les sodas prĂ©biotiques diffĂšrent des probiotiques comme le kombucha ou le kĂ©fir : au lieu dâintroduire de nouvelles bactĂ©ries dans lâintestin, ils nourrissent celles dĂ©jĂ prĂ©sentes. Olipop et Poppi utilisent notamment de lâinuline, une fibre issue de lâagave ou de la racine de chicorĂ©e. Ces marques ont su imposer leur image, notamment grĂące Ă des campagnes marketing percutantes : publicitĂ©s lors du Super Bowl, collaborations avec des influenceurs et une forte prĂ©sence en grandes surfaces et cafĂ©s. Olipop est ainsi disponible dans 12 000 Starbucks Ă travers les Ătats-Unis.
Les consommateurs apprĂ©cient ces alternatives, bien que leur goĂ»t divise. Cullen Biever, un adepte dâOlipop et Poppi, reconnaĂźt avoir eu des rĂ©ticences initiales, mais a fini par adopter ces boissons pour limiter sa consommation de sodas sucrĂ©s. Cependant, les experts en nutrition restent prudents. Dr Sean Spencer, gastro-entĂ©rologue Ă Stanford, affirme que si ces sodas permettent de rĂ©duire lâapport en sucre, ils peuvent ĂȘtre une bonne option. En revanche, pour les personnes souffrant de syndrome de lâintestin irritable (IBS), lâinuline peut provoquer des ballonnements et des troubles digestifs. Jamie Allers, diĂ©tĂ©ticienne, conseille plutĂŽt de privilĂ©gier les aliments naturellement riches en prĂ©biotiques, comme lâail, les oignons ou les bananes.
Pour les gĂ©ants du soda, ces boissons prĂ©biotiques reprĂ©sentent une opportunitĂ© de croissance alors que les ventes de sodas classiques (Coca, Pepsi, Dr Pepper) ont baissĂ© dâenviron 1 % en un an. Pourtant, Olipop ne semble pas inquiet face Ă cette concurrence. Lâentreprise vient de lever 50 millions de dollars et atteint une valorisation de 1,85 milliard de dollars. Son cofondateur Ben Goodwin se fĂ©licite dâavoir ouvert la voie : "Nous avons créé cette base, et maintenant tout le monde veut sây installer."
Wall Street Journal, When the Michelin Star Becomes a Restaurantâs Curse, 13/02/2025
Loin dâĂȘtre uniquement un symbole de prestige, une Ă©toile Michelin peut aussi devenir une contrainte pesante pour certains restaurants, tant sur le plan financier que crĂ©atif. Câest ce quâillustre lâexemple du restaurant Giglio, Ă Lucques en Italie, qui a demandĂ© Ă se faire retirer son Ă©toile Michelin du guide 2025. LaurĂ©at dâune Ă©toile en 2019, lâĂ©tablissement a vu sa clientĂšle Ă©voluer, attirĂ©e par le prestige du guide plutĂŽt que par sa cuisine. Pour les chefs, cette distinction, bien quâhonorifique, est devenue une charge, les empĂȘchant dâexprimer pleinement leur vision culinaire.
Depuis plus dâun siĂšcle, le guide Michelin est une rĂ©fĂ©rence dans le monde mais certains restaurateurs affirment que cette reconnaissance peut ĂȘtre une "cage dorĂ©e", imposant un standard de perfection permanent. Scott Nishiyama, chef et propriĂ©taire dâEthelâs Fancy en Californie, confie que la peur constante dâĂȘtre Ă©valuĂ© par un inspecteur Michelin limite la libertĂ© crĂ©ative et augmente la pression sur son Ă©quipe.
En plus du stress, une Ă©toile peut aussi affecter nĂ©gativement les finances dâun restaurant. Simon Olesen, propriĂ©taire de la brasserie MĂžntergade Ă Copenhague, explique que son Ă©tablissement, listĂ© dans le guide sans Ă©toile, attire une clientĂšle rĂ©guliĂšre, y compris des professionnels qui y dĂ©jeunent plusieurs fois par semaine. Obtenir une Ă©toile pourrait donner une image de luxe excessif et dissuader ces clients fidĂšles. Les coĂ»ts dâexploitation augmentent Ă©galement, avec lâexigence de produits plus haut de gamme, la hausse des loyers et la pression pour offrir une expĂ©rience irrĂ©prochable.
Selon une Ă©tude de 2021 publiĂ©e dans le Strategic Management Journal, une Ă©toile entraĂźne dâabord une hausse de frĂ©quentation, mais souvent suivie dâune pĂ©riode de baisse des revenus, difficile Ă compenser. Certains restaurateurs prĂ©fĂšrent donc renoncer Ă cette distinction pour prĂ©server leur Ă©quilibre financier et personnel.
Pour Gwendal Poullennec, directeur international du guide Michelin, ces cas restent rares : en six ans, seuls quatre restaurants ont tentĂ© de rendre leur Ă©toile. Michelin refuse cependant les demandes de retrait, considĂ©rant que seule la qualitĂ© culinaire dĂ©termine la prĂ©sence dâun restaurant dans le guide. MalgrĂ© cela, le Giglio apparaĂźt dĂ©sormais sans Ă©toile sur le site du guide, confirmant une tendance grandissante : pour certains chefs, le vĂ©ritable luxe est de cuisiner sans contrainte.
Fast Company, Study finds gluten-free products often have more sugar, fewer nutrients than regular foods, 19/02/2025
Une Ă©tude rĂ©cemment publiĂ©e dans le journal Plant Foods for Human Nutrition remet en question les bienfaits souvent attribuĂ©s aux produits sans gluten. Alors que ces aliments sont de plus en plus populaires et souvent perçus comme plus sains, les chercheurs ont constatĂ© quâils contiennent en rĂ©alitĂ© davantage de sucre et moins de nutriments essentiels que leurs Ă©quivalents contenant du gluten.
LâĂ©tude a comparĂ© diffĂ©rents types de produits alimentaires, en examinant leur teneur en fibres, en protĂ©ines et en micronutriments. Il en ressort que de nombreux produits sans gluten sont moins riches en fibres et en protĂ©ines, ce qui peut entraĂźner des carences nutritionnelles Ă long terme. Par ailleurs, pour compenser lâabsence de gluten et amĂ©liorer la texture des produits, les fabricants ajoutent souvent du sucre ou dâautres agents de charge, ce qui entraĂźne une augmentation des calories et un index glycĂ©mique plus Ă©levĂ©.
Les chercheurs rappellent que le gluten, prĂ©sent naturellement dans le blĂ©, lâorge et le seigle, apporte plusieurs bĂ©nĂ©fices nutritionnels. Il est notamment associĂ© Ă la prĂ©sence dâarabinoxylane, un polysaccharide qui joue un rĂŽle important dans la rĂ©gulation de la glycĂ©mie et la santĂ© du microbiote intestinal. En supprimant ces cĂ©rĂ©ales, les personnes qui consomment des produits sans gluten risquent donc de passer Ă cĂŽtĂ© de ces bienfaits, sauf si leur rĂ©gime est soigneusement Ă©quilibrĂ© avec dâautres sources de fibres et de protĂ©ines.
Paradoxalement, lâĂ©tude rĂ©vĂšle que certaines variĂ©tĂ©s de pain sans gluten, notamment les pains aux graines, peuvent contenir plus de fibres que les pains classiques, grĂące Ă lâutilisation dâingrĂ©dients comme le quinoa ou lâamarante. Cependant, ces amĂ©liorations varient dâun fabricant Ă lâautre et ne sont pas gĂ©nĂ©ralisĂ©es Ă lâensemble du marchĂ©.
La popularitĂ© croissante des rĂ©gimes sans gluten repose souvent sur des idĂ©es reçues, alimentĂ©es par les tendances du marketing et les rĂ©seaux sociaux. Bien que ce rĂ©gime soit indispensable pour les personnes atteintes de la maladie cĆliaque ou prĂ©sentant une sensibilitĂ© au gluten, il est adoptĂ© par une large part de la population sans rĂ©elle justification mĂ©dicale. En 2024, environ 25 % des AmĂ©ricains consommaient des produits sans gluten, alors que seuls 6 % Ă©taient rĂ©ellement concernĂ©s par une intolĂ©rance ou une allergie.
Les auteurs de lâĂ©tude appellent Ă un meilleur encadrement des allĂ©gations nutritionnelles et encouragent les fabricants Ă amĂ©liorer la qualitĂ© des produits sans gluten en intĂ©grant des alternatives plus nutritives. Ils recommandent Ă©galement aux consommateurs dâĂȘtre attentifs Ă la composition des aliments et de privilĂ©gier une alimentation Ă©quilibrĂ©e, plutĂŽt que de se fier aveuglĂ©ment aux tendances alimentaires.
The Guardian, Extreme weather expected to cause food price volatility in 2025 after cost of cocoa and coffee doubles, 15/02/2025
Selon une Ă©tude du cabinet de conseil Inverto, la multiplication des Ă©vĂ©nements climatiques extrĂȘmes risque dâentraĂźner une forte instabilitĂ© des prix alimentaires en 2025. Cette tendance sâinscrit dans un contexte oĂč plusieurs produits de base, comme le cacao et le cafĂ©, ont dĂ©jĂ vu leurs prix plus que doubler en un an.
LâannĂ©e 2024 a Ă©tĂ© marquĂ©e par des records de chaleur, confirmĂ©s par plusieurs instituts mĂ©tĂ©orologiques. Cette hausse des tempĂ©ratures, couplĂ©e Ă des prĂ©cipitations irrĂ©guliĂšres, a gravement affectĂ© les rendements agricoles dans plusieurs rĂ©gions productrices. Par exemple, les plantations de cacao en Afrique de lâOuest ont souffert de sĂ©cheresses et dâĂ©pisodes de chaleur intense, entraĂźnant une hausse spectaculaire des prix (+163 %). De mĂȘme, les rĂ©coltes de cafĂ© au BrĂ©sil et au Vietnam ont Ă©tĂ© perturbĂ©es par des conditions mĂ©tĂ©orologiques extrĂȘmes, provoquant une augmentation de 103 % des prix du cafĂ© sur les marchĂ©s mondiaux.
Dâautres denrĂ©es alimentaires ont Ă©galement Ă©tĂ© impactĂ©es : le prix de lâhuile de tournesol a grimpĂ© de 56 %, en raison de la sĂ©cheresse en Bulgarie et en Ukraine, tandis que le beurre et le jus dâorange ont connu une hausse de plus de 30 %. Le bĆuf, de son cĂŽtĂ©, a vu son prix augmenter de 25 % en raison de lâimpact des sĂ©cheresses sur les pĂąturages et les coĂ»ts de production.
Les experts en sĂ©curitĂ© alimentaire sâinquiĂštent des consĂ©quences de cette volatilitĂ©. Selon Pete Falloon, spĂ©cialiste du climat au Met Office et Ă lâUniversitĂ© de Bristol, les phĂ©nomĂšnes mĂ©tĂ©orologiques extrĂȘmes vont continuer Ă sâintensifier tant que les Ă©missions de gaz Ă effet de serre ne seront pas maĂźtrisĂ©es. La crise climatique affecte directement les rendements agricoles et, par ricochet, la stabilitĂ© des chaĂźnes dâapprovisionnement mondiales.
Face Ă cette incertitude, Inverto recommande aux entreprises agroalimentaires et aux distributeurs de diversifier leurs sources dâapprovisionnement pour Ă©viter une trop grande dĂ©pendance Ă certaines rĂ©gions vulnĂ©rables aux alĂ©as climatiques. Les gouvernements sont Ă©galement appelĂ©s Ă renforcer les stratĂ©gies de rĂ©silience, notamment en soutenant lâinnovation agricole et en adaptant les politiques de sĂ©curitĂ© alimentaire.
En parallĂšle, la hausse des prix alimentaires aggrave lâinsĂ©curitĂ© alimentaire dans de nombreux pays. En dĂ©cembre 2024, le gouvernement britannique a alertĂ© sur lâaugmentation du nombre de mĂ©nages en situation de prĂ©caritĂ© alimentaire, en grande partie Ă cause de lâinflation alimentaire provoquĂ©e par le changement climatique.
Max Kotz, du Potsdam Institute for Climate Impact Research, souligne que la situation est amenée à se détériorer tant que des actions concrÚtes ne seront pas mises en place pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer la résilience des systÚmes agricoles face aux nouvelles réalités climatiques.
LâannĂ©e 2025 sâannonce donc particuliĂšrement instable pour le marchĂ© alimentaire mondial, et la nĂ©cessitĂ© dâanticiper ces chocs devient un enjeu majeur pour les gouvernements et les industries concernĂ©es.
Le Demeter 2025, NOURRIR 2050 : de la fiction à la réalité
Alors que sâouvre un nouveau quart de siĂšcle, le champ des possibles dâici 2050 est aussi imprĂ©cis quâillimitĂ©. Devrions-nous, dĂšs lors, en dĂ©crĂ©ter son illisibilitĂ© ? Lâaffirmative serait chose facile, dâautant que les dĂ©rĂšglements gĂ©opolitiques et climatiques en cours peuvent nous emporter vers le pessimisme et lâimmĂ©diatetĂ©. Quand tout semble vaciller et aller plus vite, nos regards se dĂ©tournent de lâessentiel. Or voir au loin est nĂ©cessaire, et pour ce faire, il faut voir tĂŽt.
2050, câest dĂ©jĂ demain, et les enjeux alimentaires et agricoles occuperont une place toujours centrale : davantage de personnes Ă nourrir, dâappĂ©tits et de profils diffĂ©renciĂ©s chez les acteurs qui rythmeront la marche mondiale, de dĂ©fis productifs Ă rĂ©soudre et dâingĂ©niositĂ© Ă dĂ©ployer. Sur ces terrains stratĂ©giques, les dĂ©terminations, les compĂ©titions et les tensions ne manqueront pas de sâamplifier.
Afin dâaller de lâavant et de prĂ©parer ces lendemains sans quâils dĂ©chantent inĂ©vitablement, la prise de recul sâavĂšre indispensable.
Nourrir 2050 ne sera pas uniquement lâaffaire de systĂšmes agricoles et alimentaires qui devront ĂȘtre Ă la hauteur. Il sâagit aussi de cette capacitĂ© de rĂ©flĂ©chir autrement, de combiner des analyses, des idĂ©es et des expĂ©riences, de comprendre que la complexitĂ© nous impose modestie et motivation, de sâouvrir pour penser, de penser pour agir et dâagir pour progresser.
Cette 31e édition du Déméter embarque pour le lointain, dans une série de futurs possibles et contradictoires, pour que les fictions alimentaires puissent dialoguer avec les réalités agricoles.
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O. Frey